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120                  LÀ REVUE LYONNAISE
 villes, mêlés aux bandits et aux rowdies qui en sont le fléau per-
 manent, que d'aborder la rude existence du pionnier trappeur. Les
 aventuriers, qui, à l'époque de la fièvre d'or, se précipitèrent
 dans la direction de la Californie, valaient encore moins que les fils
 déguenillés de l'Irlande. Malais, Chinois, Lascars, anciens convicts
 de l'Australie, rôdeurs des barrières parisiennes, des docks de
 Londres ou de Liverpool, rebuts des quais d'Amsterdam, d'Anvers
 et de Hambourg, déclassés de tout genre et de toutes nations, in-
 sensibles à tout autre sentiment qu'à celui d'une cupidité féroce, ils
 constituaient à San-Francisco une société sans Dieu, sans foi,
 sans loi, sans règle, sans police, et que la justice sommaire inventée
 par le colonel Lynch pouvait seule mettre à la raison, en attendant
 que l'affreux chaos des premiers jours eût été débrouillé, et que
 chaque mineur ne fût plus doublé d'un bandit.
    Tout autre est l'émigration actuelle dans les préparatifs de son
 exode, la composition de ses cadres, la nature de ses ressources
 et le classement définitif de son personnel dans la nouvelle patrie.
 De grandes compagnies se sont organisées à New-York, Philadel-
 phie, Baltimore, Boston, Londres, Liverpool et les principaux ports
 de l'Allemagne, pour encourager les volontaires, organiser les dé-
 parts, veiller aux soins sanitaires, donner aux faibles et aux ma-
 lades les attentions voulues. Hommes, femmes, enfants, jeunes
gens, vieillards, familles complètes, tout s'ébranle en bel ordre de
 départ et avec cette résolution mûrie qui caractérise les émigrations
sans esprit de retour. On a réalisé un pécule suffisant (le bureau
officiel de Washington constate que chaque émigrant des années
dernières apportait avec lui cent dollars); de cette façon, et à peine
arrivée à New-York, la famille ne se trouvera pas au dépourvu.
Des correspondants, des courtiers, des entrepreneurs, des directeurs
de grands travaux les attendent : on les reçoit provisoirement dans
des hôtels spacieux où le service matériel, le service des ren-
seignements commerciaux et industriels, offres, prix, conditions,
tout enfin est organisé pour leur faciliter le choix de laprofession
et les premiers débuts. C'est qu'à ce moment, en effet, le nouvel
arrivé n'a pour ainsi dire que l'embarras du choix entre les carriè-
res diverses que les compagnies formées pour le développement
de l'émigration lui proposent.