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UNE M Y S T I F I C A T I O N S C I E N T I F I Q U E 49 mique, que Yati-Richi a été élu brahmatma en l'an 13,300 avant notre ère. « Il n'est pas dans notre propre histoire de date plus indiscutable que celle ci. » On ne peut pas être plus affirmatif, on l'avouera ; cependant avant de s'engager aussi à fond, M. Jacolliot aurait bien fait de prendre connaissance des beaux travaux de Golebrooke et de M. Weber sur l'astronomie des Indous. Il y aurait vu que ceux-ci, loin d'avoir « inspiré » les astronomes grecs, leur ont emprunté la meilleure partie de ce qu'ils savaient de positif sur la mesure du du temps et les mouvements des corps célestes. On en trouve la preuve formelle dans ce fait que les termes techniques d'astronomie dont ils se servent sont, pour la plupart, purement et simplement transcrits du grec. Voilà qui tranche radicalement la question, ce me semble, en ce qui regarde les contes fantastiques que peut con- tenir l'Avadhana~Saslra(?) ou le Vedanga-Sasira (W), lesquels sont sans doute des ouvrages tamouls très modernes. Du reste, au point de vue purement logique et critique, de pareilles assertions ont tout juste la valeur qu'aurait, par exemple, la mention chro- nologique d'un rituel de l'ancienne Rome se rapportant au règne de Saturne. Je suppose, en effet, qu'on découvre un document de ce genre dans lequel on lirait que Saturne gouvernait le Latium en l'année où le soleil entrait dans le signe du Taureau le premier jour du printemps, et que, tout calcul fait, oh trouve que cette année correspondait à l'an 8,550 avant la fondation de Rome. En conclurait-on, « avec la certitude d'un calcul astronomique » que le fait est exact et qu'on peut rectifier et augmenter lïhistoire en conséquence? Il faudrait, je crois, établir au préalable l'autorité historique du rituel en question, de même que M. Jacolliot était tenu avant tout de nous démontrer le caractère infaillible des indications de l'Ava- dhana-Sastra. Je m'explique très bien d'ailleurs qu'il ait négligé de le faire : l'entreprise eût été autrement difficile que de publier toute sa série d'in-octavos sur l'Inde, y compris le Voyage au pays des Bayadères. M. Jacolliot s'y est-il pris de manière à mieux nous convaincre en matière de légendes comparées ? Nous allons le voir. JANV. 1881. — T. I. 4