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3g                      LE PÈRE GRASSET

 « lequel auroit esté trouvé mort dans son lit nuptial, le soir
même de ses noces, auprès de sa chaste épouse, par l'en-
tremise de l'ennemi du genre humain, qui laissa la marque
de son action déplorable en noircissant dans la même
chambre, tous les portraicts des faces humaines qui pou-
voient blesser les chastes pensées — fable, ajoute le bon
religieux, aussi éloignée de la vérité que la vérité l'est de
la fausseté d'icelle. »
    La plupart des pièces sur lesquelles notre chroniqueur a
travaillé ayant disparu, et sa bonne foi, garantie par une
bonne dose de simplicité, étant au-dessus de tout soupçon,
son travail prend la valeur d'un document original. D'ail-
leurs, le plus souvent il reproduit le texte des discours,
lettres et bulles, qui se rapportent à son sujet. Une bonne
moitié du manuscrit est formée de documents officiels, et,
si le reste de l'ouvrage ne dénote pas précisément un écri-
vain de goût et de talent, — choses assez rares de son
temps, au moins en province ; — si les longueurs et les
incorrections, peut-être même d'assez nombreuses erreurs
de détail, gâtent un peu le plaisir qu'on aurait à le lire, il
ne faut pas oublier que nous avons à faire, non pas à un
écrivain de profession, mais à un modeste religieux qui n'a
jamais visé plus haut qu'au titre de compilateur conscien-
cieux et dont l'unique but a été de laisser, à l'usage des
religieux de son ordre et à la gloire des bienfaiteurs de son
monastère, un résumé fidèle des archives qu'il avait en
mains. Le volume avec sa solide reliure ancienne, sa grosse
écriture faite pour des yeux de vieillards, et son fort papier
de chiffon comme on n'en fabrique plus aujourd'hui que
sur commande, témoigne à priori qu'il n'a jamais compté
sur les honneurs de la typographie. Il y aurait peut-être ici
une question à examiner : le manuscrit est-il de la main du