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                            BIBLIOGRAPHIE                            301

risa beaucoup la révolution luthérienne. Ulrich de Hutten engagea, par
des escarmouches, le combat contre le clergé. Dans ses Lettres tys
hommes obscurs, lettres anonymes, il dirigea contre les humanistes des
attaques exagérées, en demandant contre eux des mesures de répression
ridicules. Les moines ne s'aperçurent pas d'abord du stratagème et
furent les plus zélés à répandre les lettres. Ils ne tardèrent pas à recon-
naître leur erreur, mais il était trop tard. Remarquons, en passant, que
ces lettres étaient écrites en latin. Quel Allemand consentirait cepen-
dant à ne pas les faire entrer dans la littérature allemande !
   Erasme aurait peut-être pu réconcilier les deux partis et faire aboutir
leur lutte à une réforme véritable; il avait un immense talent, mais il
manquait de caractère. Confiné dans le monde savant, n'écrivant guère
que pour les lettrés, il laissa le champ libre à Luther. Quelle diffé-
rence entre ces deux hommes! Quelle différence entre leur action sur
leurs contemporains !
   Luther n'a pas seulement séparé l'Allemagne de l'Église romaine ;
il a achevé le développement de la prose allemande par sa traduction
de la Bible, et lui a donné sa forme définitive et son génie. Chose
curieuse, les deux ouvrages qui ont eu la plus grande influence sur la
littérature allemande, l'un pour créer la langue, l'autre pour la par-
faire, ont été deux traductions de la Bible.
   Deux siècles vont encore s'écouler avant l'apparition des chefs-
d'œuvre de Schiller et de Gœthe, mais la langue se sera perfectionnée ;
elle sera devenue digne de ces deux grands poètes.
   Ce premier volume contient toutes les origines de la littérature alle-
mande. Le second commencera l'examen de la période moderne. Nous
souhaitons à cette deuxième édition d'un ouvrage considérable, fruit de
plus de quinze années d'études et de nombreux voyages, le même suc-
cès qu'à la première. Puisse-t-elle, en répandant de plus en plus les
idées de l'auteur, contribuer à faire quelque bien, seul but de M. Hein-
rich, et à conserver le souvenir de ce maître excellent que la mort a
trop tôt ravi à sa famille, à ses élèves et à ses amis.

                                                     E. CHARVÉRIAT.




     N° 4. — Avril 1889                                         21