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L'ŒUVRE DE PIERRE DUPONT 357 beaucoup d'autres, notre tempérament est fait de compro- mis, sinon de constrastes : on a, d'ailleurs, constaté combien le sentiment artistique s'allie en nous à l'esprit industriel, et il est de notoriété que l'âpreté au gain n'exclut nulle- ment une charité proverbiale dans l'univers entier. Il n'est pas besoin de feuilleter longtemps l'œuvre de Pierre Dupont pour se convaincre qu'il est de ceux qui se sentent attirés au-delà du monde visible ; par nature, ce serait donc un mystique, par éducation, il est religieux. Dès les premières pages, nous rencontrons, dans Belzé- buth et les Louis d'or, ce personnage traditionnel de la légende chrétienne : le diable. Non un démon de fantaisie, un diablotin de féerie, mais un Satan parfaitement ortho- doxe, s'il est permis d'accoupler ces deux mots. Dans la première de ces chansons, la scène s'ouvre ainsi : Un pèlerin de vingt ans, beau mais triste, Le front baissé, le bâton à la main, Marchait dans l'or, la pourpre et l'améthyste, Dont le couchant inondait le chemin. Il méditait sur l'humaine souffrance Dont son cœur jeune avait connu le poids... Voilà certes une figure pour laquelle un Lyonnais a dû poser ! Ce n'est point que la rêverie et la méditation soient un fruit spécial à notre sol, pas plus que l'Orient n'a le privilège des yeux noirs. Toutefois, il est des traits qui marquent une race, et personne ne verra dans le pèlerin de Pierre Dupont un fils de la Provence, égrenant sa canti- lène dans la poudre ensoleillée des chemins, ou un enfant de la Touraine, cette terre douce, joyeuse et pleine de délices, ainsi que l'a nommée le Tasse.