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178                    PAUL HUMBLOT

dans ses excès, auxquels ils trouvèrent toujours de poé-
tiques excuses. L'ordre, la sécurité, le salut, lorsqu'ils leur
furent imposés, leur semblèrent plus insupportables que les
agitations et les excès de l'indépendance, et ils en mau-
dirent les bienfaits parce qu'ils ne pouvaient les discuter.
Accoutumés à tout peser sur l'égal plateau de la justice, à
mettre le droit au-dessus de tout, ils n'ont jamais compris
qu'en politique les faits pussent reprendre parfois leur
toute-puissance ; ils n'ont pas admis que les idées les plus
généreuses fussent souvent grosses de conséquences mena-
çantes et fatales et que la force brutale pût devenir une
nécessité souveraine, la pressante condition du salut
commun. Les avocats sont nés contradicteurs, et les habi-
tudes de leur profession les rangeront toujours dans les
rangs de l'opposition. Les plus flatteuses avances n'en
feront jamais les amis du maître, ne pourront désarmer
leur contrôle frondeur et leurs malicieuses critiques, et le
pouvoir trouvera sans cesse en eux ses adversaires les plus
spirituels et les plus impolitiques.
    Il n'est pas étonnant dès lcrs que le Barreau ait accueilli
comme la plus pénible des surprises l'avènement soudain
d'un gouvernement qui n'aimait guère les dissertations
inutiles. Mais je crois respecter la vérité en affirmant que
les avocats ne formèrent alors qu'une minorité taquine et
se trouvèrent isolés dans leur opposition innocente et rail-
leuse. A l'Empire qui apparaissait comme une répression,
il fallait le silence autour de son Å“uvre d'ordre et d'apaise-
ment. Les chicanes, les récriminations, les excitations de la
presse et de la tribune tourmentant les crédulités populaires
eussent été les malvenues. On avait trop parlé, maintenant
on devait se taire. Puisqu'un chef unique se chargeait
du salut de tous, il fallait se confier sans questions à sa