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138 DEUX MOIS EN ESPAGNE Le nouveau palais construit par Philippe V, en 1735, sur un plan parfaitement régulier, fut achevé en 27 ans sans modification importante, et a l'empreinte de cette époque ; sa forme est carrée, et les angles sont garnis de pavillons qui font un effet agréable en rompant la monotonie de ses li- gnes droites ; près du palais, est une grande place qui le sé- pare des édifices consacrés à son service, et du musée d'ar- mes (de Varmerie) bien curieux à visiter, mais qui, comme la collection des peintures, exigerait un livre pour le décrire; ce côté rappelle la petite cour de Versailles; de l'autre, sont les écuries et les dépendances. Cette résidence royale, d'une architecture très riche, est plus remarquable par son fini, que par le talent des décorateurs et des sculpteurs qui y furent employés. On rapportait autrefois, avec terreur, qu'elle avait coûté quatre-vingts millions ; grâce aux pro- grès du luxe, on fait maintenant moins d'attention à un tel chiffre? Elle est entourée de colonnes et de pilastres qui font saillie sur ses murailles, et couronnée par une galerie à l'italienne, faite pour dissimuler la toiture, et être garnie de statues; mais les piédestaux seuls en existent, car l'on s'est aperçu à temps que leur poids ferait ébouler l'édifice. Ces bâtiments forment la majeure partie du luxe de la Couronne; car la cour d'Espagne, si riche au temps passé, ne l'est plus à notre époque. La reine, qui est, dit-on, volée par tous ses employés grands et petits, n'a qu'un budget médiocre, et un grand train à soutenir. Il n'y a pas peut- être, en Europe, de souverain qui ait plus de valets et de chevaux dans ses écuries, et qui dans les minimes circons- tances soit obligé à se faire représenter par plus de carosses vides, de piqueurs jet de "gens de livrée. Le peuple y tient comme aux broderies des Piccadores, et se regarderait comme déchu dans la balance européenne, si l'on retranchait seu-