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DEUX MOIS EN ESPAGNE I39 lement la garniture des chapeaux de la grande écurie ; ces vétilles deviennent considérables, quand le public y attache cette importance. Je visitai donc avec intérêt, pendant une heure, les im- menses salles à la suite les unes des autres, les seules, au reste, que je pouvais voir dans le palais, qui contiennent toute la défroque de la livrée ; elle était étalée dans des vi- trines d'acajou, comme, chez nous, les singes empaillés de nos musées d'histoire naturelle. Ici sont les chapeaux ga- lonnés auxquels sont destinés des myriades d'étagères; ce quartier est celui des lampions de MM. les cochers, cet au- tre des casquettes de jockeis; tout au fond, les chapeaux à claque des valets de pieds, etc. La collection est grande, car chaque homme doit avoir trois tenues : la grande, la médiocre et la petite; il y a, de plus, des tenues spéciales, qui ne servent qu'à une circonstance. « Quand la reine va aux courses de taureaux, disait le gardien, voilà sa livrée, » et il me montrait jusqu'à la crava- che du groom qui perdrait son intérêt vue dans une autre cérémonie ; il faut être Espagnol, pour apprécier cette col- lection; tant pis pour l'étranger, s'ilne se sent pas vivement ému par toutes ces brides, ces harnais et ces selles ! il n'en sera pas moins convaincu, après leur inspection, que les selliers de Madrid sont de très habiles ouvriers, presque des artistes, sauf la surcharge d'ornements dorés, qui n'est pas dans nos modes. Du vestiaire et de la sellerie, je passai aux écuries qui contiennent des masses de chevaux d'équipages. Il y en avait d'anglais fort beaux, mais en petit nombre ; de magni- figues arabes de la race persanne ; enfin., des andaloux que je tenais fort à voir, sachant qu'ils étaient la fleur des ha- ras de l'Espagne. Je crois qu'ils perdaient beaucoup au voi- sinage des magnifiques bêtes que je venais d'inspecter, car,