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j|l2 ORGUEIL en lui expliquant qu'il ne fallait pas, par amour-propre, exposer toute une brave garnison à prendre le chemin des nuages ; que, si ce qu'avançait le voisin n'était pas vrai, il serait plus amusant de le pendre haut et court, le lende- main, à la place du drapeau. « Pendant ces explications, M. le baron, comme s'il eût été chez lui, sifflait trois fois dans son sifflet d'argent. « Aussitôt une vingtaine de lurons un peu déchirés et barbouillés de sang bondirent sur la plate-forme, la dague à la main droite et une torche à la main gauche pour éclairer la scène. a — Si vous le voulez bien maintenant, Monsieur, re- prit le vieux gentilhomme avec son exquise courtoisie, vous allez m'accompagner et vous pourrez vérifier par vous- même l'exactitude des faits que j'ai avancés touchant la poudrière et Madame Pudding. « Le Grand-Carotte rageait, mais il fallut s'exécuter ; tous ses soldats surpris venaient d'être désarmés en un clin d'œil par les nôtres ; la porte de l'escalier était bien gardée et le moindre mouvement hostile aurait pu provo- quer un massacre. « On lui prouva que sa femme et les poudres étaient bien, en effet, sous la sauvegarde de maître Durand. Or, de ce moment, l'Anglais ne parla pas plus qu'un poisson. « La garnison et son chef furent mis en lieu sûr, en at- tendant l'échange, et le lendemain, au matin, les bonnes gens des environs furent fort surpris de voir flotter la ban- nière du Fossat sur les murs d'Orgueil. « La partie des assaillants la plus maltraitée avait été le troupeau de chèvres ; quelques-unes s'étaient noyées, d'au- tres avaient été légèrement brûlées, parce que les torches s'étaient consumées jusqu'au bout. Mais M. de Fossat, qui n'était pas chiche, les paya grassement à leurs propriétaires.