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DEUX MOIS EN ESPAGNE 137 en France que, sans risquer sa considération, ou peut-être même sans craindre d'être honni par les titis qu'on trouve- rait sur sa route, un grand seigneur pourrait vivre ainsi sans façon, et de pair et compagnon avec les plus menus gens du peuple. C H A P I T R E XIV MADRID Madrid est une immense ville à laquelle, quand on re- vient du midi de l'Espagne on trouve peu de cachet natio- nal ; peut-être la chaleur suffocante que l'on y éprouve dans ce moment, est-elle pour quelque chose dans l'impression qu'elle produit sur moi. Hors ses admirables collections artistiques, sa population qui cherche à imiter la France, et ses constructions, qui se ressentent des nombreux séjours que son aristocratie fait dans notre capitale, charment peu le voyageur qui connaît les modèles dont elles sont les plus ou moins malheureuses copies. La basse classe seule a per- sévéré dans ses habitudes et ses costumes, encore fait-elle tous ses efforts pour les modifier, et ressembler le moins possi- ble à une ville de la Péninsule. Jetons un coup d'ceil sur ses principaux quartiers, et disons d'abord quelques mots de son palais où l'on ne pouvait pénétrer ; la reine l'occu- pait dans ce moment et même y faisait ses couches. La position choisie par les Maures qui y avaient cons- truit un château fort, où fut détenu notre roi François I", est magnifique ; elle est à l'extrémité du plateau qu'occupe la ville; ses jardins, en pente douce, descendent jusqu'au Man- zanarès que l'on voit serpenter au loin entre de petites colli- nes, car le mont Pio est le seul point qui la domine.