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    DEUX MOIS EN ESPAGNE
                        I er Mai 1861

                            (Suite)




   La nuit m'avait surpris dans cette charmante promenade,
et quand je rentrai dans la station du chemin de fer qui
mène à Madrid, je trouvai dans la salle du buffet quatre ou
cinq individus en culottes de velours, que je pris, à leur
costume, pour de bons paysans de la campagne voisine. Je
fus cependant étonné des égards avec lesquels les garçons
servaient l'un d'entre eux. « C'est M. le duc à!Avdllano me
dit mon cicérone, en se rangeant de très loin pour lui laisser
le passage libre, et il est avec trois ou quatrepiccadores à qui
il vient de vendre des taureaux pour la course qui a lieu
demain à Madrid. »
   L'explication de mon cornac n'était pas inutile, car le
costume de M. le duc était exactement celui que doivent
porter ses palefreniers les jours où quittant la livrée du
maître, ils ne sont plus de service chez lui. Quoi qu'il en
soît de son habit, M. le duc n'en fit pas moins de très
bonne grâce les honneurs du buffet à ses quatre convives,
et quand nous arrivâmes à Madrid, il les fit monter dans
un très élégant équipage qui les attendait à la gare.
   Voilà bien l'Espagne cette fois, me dis-je en les voyant
tous les cinq dans cette belle voiture à armoiries et livrées,
et malgré toutes nos belles idées libérales, ce ne serait pas