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                  DEUX MOIS EN ESPAGNE                     33

servant de défense aux vergers d'oliviers dont ils sont les
cadres obligés. Nous en sortons bientôt pour passer dans
un pays qui promet de riches moissons ; et plus loin, dans
des pâturages arides, jachères qui ne produisent que de
maigres bruyères, que n'en dévorent pas moins des trou-
peaux de bœufs et de chevaux qui, sans bergers, errent au
loin de quelques rares habitations.
    Lébrija qui domine la route, de sa pittoresque et vieille
enceinte fortifiée, est la seule agglomération de maisons qui
attire l'attention du voyageur, et lui offre un clocher, copie
bien réduite de la Giralda de Séville. Quand on l'a dépassé,
on entre dans les célèbres vignobles de Xérès, nom qui ré-
sonne agréablement à l'oreille du gourmet et ne saurait dé-
plaire à celle du touriste. Son aspect est à peu près celui des
fameux clos de Bourgogne, sauf que ses ceps me semblent
encore maintenus plus bas que les nôtres, au moyen d'une
taille fréquente et vigoureuse.
    Ce pays ressemble bien plus à la France qu'au reste de
l'Espagne; partout de grandes maisons d'exploitation ou de
campagne, un commerce, un roulage des produits de la
vigne, enfin un mouvement tout-à-fait inusité dans le reste
 de la Péninsule, et que Ton a quitté à quelque cent lieues
 de là, en passant la frontière ; mais ce n'est qu'un rêve
 dû aux établissements anglais qui y pullulent; encore quel-
 ques lieues et à Sainte-Marie qui en est tout près, vous re-
 trouvez la solitude des grands pâturages et au bord de la
 mer, que la voie ferrée commence à côtoyer, les longues
 grèves et les marais salins qui en font l'unique richesse.
 Vous voilà aux fameuses fortifications du Trocadero, séparé
 de la terre ferme par un bras de mer moins large que le
 Rhône, que \ ous traversez sur un pont magnifique, et vous
 entrez dans l'île de Léon, dernier refuge des Cortès et de la
 nation Espagnole, quand ils se levèrent en masse pour