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LE JEUDI-SAINT A ROME. De toutes les magnifiques cérémonies de la Semaine-Sainte à Rome, celle qui m'émut le plus profondément peut-être et dont mon cœur conserve le plus ineffable souvenir a lieu le Jeudi- Saint; c'est le lavement des pieds par le souverain pontife de treize pèlerins représentant les apôtres, et la Cène, quand il leur sert à manger de ses propres mains. Ni le dimanche des palmes avec ses joies mêlées de douleur et de deuil, et toutes les pompes de la cour romaine ; ni la solen- nité de Pâques dans la basilique de Saint-Pierre, lorsque mar- bres précieux, statues de Michel-Ange et de Canova, colonnes du temple de Jérusalem, bronzes du Panthéon, métaux étinee- lants et candélabres de Cellini, tableaux de Raphaël, radieuses mosaïques, tout semble s'animer et prendre une voix pour chanter avec les anges et les hommes l'éternel alléluia de la Résurrection ; ni ce moment suprême où sur une foule agenouillée qui rassemble en son sein des groupes de presque toutes les nations de l'univers , la bénédiction majestueuse du Saint-Père semble descendre comme une promesse d'immortalité ; non, au- cune de ces sublimes choses n'avait aussi fortement pénétré dans moa âme, ne l'avait aussi délicieusement attendrie que l'aspect du vicaire vénérable de Jésus-Christ, s'agenouillant à l'exemple de son divin maître, à dix-neuf siècles de distance, devant de pauvres étrangers (pellegrini) pour laver leurs pieds dans une eau pure et leur servir lui-même l'agape de la fraternité évangé-