Pour une meilleure navigation sur le site, activez javascript.
page suivante »
188                 SONNETS HUMOUR1ST1QUI3S.




                           UN AMI.


  Je n'ai d'ami qu'un chien. Pour je ne sais quels torts,
  De nia main, certain jour, il reçut l'étrivière.
  Ce chien me repêcha, le soir, dans la rivière.
  Il n'en fut pas plus vain, — moi, j'eus bien des remords.

  Nous ne faisons, depuis, qu'une âme dans deux corps.
  Lorsqu'on m'emportera sur la triste civière,
  Je veux que mon ami me suive au cimetière,
  Le front bas, comme il sied au cortège des morts.

  On comblera ma fosse. Alors, ô pauvre bête !
  Las de flairer le sol, en secouant la tête,
  Seul au monde, et tout fou de n'y comprendre rien,

  Tu japperas trois fois ; —je répondrai peut-être.
  Mais si rien ne répond, hélas ! c'est que ton maître
  Est bien mort ! Couche-toi pour mourir, mon bon chien !


   De tels vers savent assez bien retenir l'attention pour que je
puisse sans leur nuire attirer un instant la vôtre sur le char-
mant volume qui les renferme. C'est un de ces bijoux typogra-
phiques comme il en sort si souvent des presses de notre compa-
triote M. Louis Perrin. Félicitons-nous qu'il ait appliqué son art
à une œuvre aussi remarquable que celle de M. Soulary.
   En résumant l'impression que sa lecture nous a fait éprouver,
nous pouvons dire que depuis longtemps notre ville n'a rien
produit d'aussi distingué en fait d'imagination et de poésie.
C'est l'œuvre d'un vrai poète et d'un talent tout à fait personnel.
                                    Victor de   LAPRYDE,