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20 DE L'UNITÉ DK I.'AME PENSANTK. La question de la conscience et de l'inconscience n'est d'ailleurs ni aussi simple ni aussi nette qu'on pourrait peut- être le croire au premier abord. C'est par des degrés insen- sibles et, pour ainsi dire, par des infiniment petits qu'on va de l'une a l'autre. Qui peut dire précisément où la conscience commence, qui peut dire où la conscience finit? Ajoutons qu'en toute question de ce genre la mémoire intervient nécessairement, or, du défaut de la mémoire on ne peut conclure, avec certitude, au défaut de la conscience. Leibniz, selon nous, a eu raison de dire : « C'est une grande source d'erreurs de croire qu'il n'y a aucune per- ception dans l'âme que celle dont on s'aperçoit (1). » S'il est vrai que rien de ce qui appartient réellement à l'âme ne peut passer inaperçu, plus de continuité de la pensée, plus d'idées innées, et c'est Locke, selon Leibniz, qui a raison contre Descartes. On dit que rien de ce que nous ignorons ne saurait appartenir a l'âme ; nous prétendons au contraire qu'il n'est rien de ce qui appartient à l'âme, même le plus incontestablement, pensées, sentiments ou même volontés, que nous ne puissions ignorer, par une cause ou par une autre, soit parla faiblesse et la confusion, soit parla conti- nuité et l'habitude, soit enfin par distraction de la part de notre esprit. Quoi de plus saillant dans l'âme et dans la conscience que les efforts volontaires ! Quoi de moins sujet, a ce qu'il semble, a l'inadvertance ou à l'oubli ! Cependant tout exercice, non pas seulement de l'activité volontaire spontanée, mais même de l'activité réfléchie, au bout d'un temps plus ou moins long, par le seul effet de l'habitude, s'accomplit a notre insu, comme on le voit dans chaque art, dans chaque profession, comme on le voit surtout dans l'exercice général et ordinaire de l'activité humaine. Que (I) iVoMmiMar mnis, 2» livre, chnp. I1'1'.