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407 que nos ancêtres appelèrent long-temps le rameau des spec- tres et le vainqueur des poisons ; c'est alors que la jeune fille des Gaulois , sortant des bois du Mont-d'Or, au milieu de la n u i t , traversait mystérieusement sur un léger esquif, les flols ombragés de YArar , et descendait dans cette î l e , où elle devait rester cachée dans l'épaisseur des bruyères. Près du lieu où s'élève un rocher isolé, était une solitude impéné- t r a b l e , d'où , selon une tradition populaire , les arbres deve- naient autant de flambeaux qui éclairaient les solennités d'un culte formidable. Après ces c é r é m o n i e s , les mille lu- mières qui brillaient dans celle profondeur, s'éleignaienî, et une obscurité plus grande ressaisissait les bruyères mystérieuses (1). Dans cetle solitude , la haute pierre du m o - nument druidique, dont l'ombre concourait, il y a plus de deux mille ans , à ces solennelles terreurs de la n u i t , a été brisée p a r l e christianisme. Une croix de bois, plantée au coin d'un rocher agresle et sauvage, devint le point de ralliement des premiers chrétiens persécutés , qui^ après avoir erré sur les bords de celte île^ un inslantinhospitalière, trempèrent son sol de leur sang (2). Ainsi commença le culte de Marie ; un tronc d'arbre fut son premier temple ; plus tard elle eut un sanctuaire qui devint une merveille. Les rois et les peuples ac- couraient à l'envi sur ses bords , pour déposer leurs offrandes sur son autel. Que de prières résonnèrent alors sous les ra- meaux des arbres qui jusque-là avaient élé muets ! Quel dais plus simple et plus touchant! aussi, dès ce m o m e n t , ces nou- veaux soldats de la foi, après avoir donné dans cetle retraite , l'exemple de la pauvreté el de l'humilité évangélique , firent place a u n e de ces sociétés d'hommes qui, dans tous les temps, éloignés du monde par des malheurs , s'occupèrent de l'élude (1) Gaule poétique. (2) Les restes de ces illustres martyrs étaient encore ensevelis, au XVIe siècle, sous les pierres tumulaires dont les cloîtres des églises de l'Ile-Barbe étaient pavés.