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249 trop tôt à l'élude et à sos amis et nous donner une rapide appréciation des ouvrages laissés par ce jeune légiste. Nous regrettons de, ne pouvoir citer le morceau qui termine cette notice nécrologique dans laquelle l'ami ra- conte les derniers momensde son ami avec une simplicité pleine de douleur. Pourquoi M. Grandperret cherche-t-il donc, en général, par un débit pré- tentieux, à donner une valeur forcée à chaque mot et à produire un inces- sant effet. Ce n'est pasà lui pourtant que nous apprendrons que le grand art pour être éloquent c'est d'être simple et vrai. Enfin M. Lacretelle , dont le tour était si impatiemment attendu, a pris la parole avec une grande bonhomie et une exquise coquetterie d'orateur. Il a su flatter adroitement son auditoire, caresser ses collègues, faire des ma- drigaux aux daines, plaire atout le monde en un mot. C'est là un grand art. Aussi quand, par trois fois , il a voulu ingénieusement passer quelques pages de son discours pour ne pas occuper si longtemps, disait-il, [l'at- tention de l'assemblée, il fallait entendre les : non! non! continuez! que lui valait ce procédé aussi délicat pour son public que malin pour les orateurs, ses devanciers. M. Lacretelle a mis à la disposition de l'école dite classique tout son esprit, et il en a beaucoup, le malin vieillard. Mais l'esprit ne vaut pas un bon raisonnement. Il peut bien étourdir un instant, captiver, séduire, en- traîner même un auditoire, mais la réflexion démolit bien vite ce brillant échafaudage de mots piquants et spirituels. C'est un feu d'artifice qui, une fois tiré, vous replonge dans votre première obscurité. Nous avons eu beau- coup de plaisir à entendre M. Lacretelle; et, quoique jeunes encore et par- tisans des chefs-d'œuvres de l'une et de l'autre école, nous avons plaint, sans nous eii moquer, cette trop précoce et poétique jeunesse qui s'est mise en possession du malheur, et nous avons ri, bien avant la boutade académique de M. Lacretelle, de tout ce qu'il y a parfois de ridicule, d'exagéré et de faux chez certains coryphées de l'école dite romantique. Mais qu'est-ce que cela prouve contre l'avenir de cette littérature! La langue de Racine était- elle justiciable des tragédies de Pradon. Le bon goût de cette époque dé- pendait-il donc de ce jugement si tranchant de M me de Sévigné : Racine passera comme le cafei deux excellentes choses qui sont loin d'être passées. Le grand siècle n'a-t-il pas eu Dorât et le marquis de Pezay ? Qui donc va mesurer à leurs petit vers la gloire littéraire de ce temps ! Et n'y a-t-il pas une criante injustice à comparer les œuvres de trois siècles à celles de uos quinze ou vingt dernières années, car M. Lacretelle n'a pas donné au romantisme de point de départ! N'est-ce pas demander à l'enfant la force de l'homme mûr, ou vouloir mesurer sa taille à celle d'un vieillard! Il n'y a, I