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de la religion en se vouant au service de Dieu ; et lorsqu'ils eu-
rent trouvé le bonheur qu'ils étaient venus chercher sur ces
roches désertes , ils firent construire des églises. D'autres, ap-
pelés p a r l e u r vocation naturelle à méditer sur les grandeurs
de Dieu , consacrèrent ces institutions au plus grand mystère
des chrétiens, en bâtissant des chapelles. Alors s'élève la
grande et célèbre abbaye de Saint-Benoît,          qui fut dans la
suite des temps une de ces retraites miraculeuses , que dans
les premiers siècles de la monarchie, le génie de la solitude
et du christianisme fonda entre la corruption des anciens
temps et la barbarie des nouveaux, pour y préparer les ger-
mes d'une civilisation sans tache. Qu'il était majestueux et
imposant ce monastère , où plus d'une fois le monde poussa
vers ses murs les cœurs les plus rebelles et les plus passion-
nés , pour y retrouver la paix qu'ils avaient perdue. Ces reli-
gieux y offraient l'image des flots de la Saône au jour des orages,
qui arrivent écumants et irrités contre les rochers de celte
île où ils s'épurent. Là, ils perdaient chaque jour de cette in-
quiétude si amère que nourrit le commerce des hommes.
   Du monastère et des églises partaient de brillantes sonne-
ries élevées au-dessus de la verdure, qui faisaient tressaillir les
ondes et que le vent envoyait au loin dans la vallée de YArar.
Toutes ces cloches se répondaient des deux bords opposés
avec celles de la petite bourgade d'Occiacum (1), et mille
échos des coteaux se les renvoyaient en murmures confus et
répercutés. Le silence de la nuit venait-il annoncer l'heure du
recueillement et des offices du soir , un nouveau bruit rem-
plissait la vallée; c'étaientles chants des psaumes qui, s'élevant
de ces mêmes l i e u x , se mêlaient en montant jusqu'au c i e l ,
comme un vaste murmure. Toutes les voix en chœur arri-
vaient aux mariniers effilées par la brise de la nuit et à moitié
tombées dans l'espace. Les patrons assis alors à la poupe de
leurs barques , les laissaient dériver tout en regrettant de ne


  ( 1) Saint-Rambert-l'flc-Barbe.