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 C'est lorsque de désobligeantes interprétations , d'amers sar-
 casmes persécutent l'artiste, le harcèlent, lui font douter de
lui et de sa vocation, et peut-être le forcent à la retraite.
Que de fois, invoquant une austère mais juste critique , n'a-
vons-nous pas eu à rougir du fade encens qu'on prodiguait aux
œuvres d'art! Sûrs de l'impartialité de leurs jurés, les artistes
se* réjouiraient d'une admonition sévère. Une citation est
pour eux un éloge et une récompense suffisante ; j'entends
ceux aux yeux desquels l'argent n'est pas l'unique but des
arts. Mais comment garder son sérieux en entendant les bi-
zarres jugements que prononce chaque jour la m o d e , feuil-
leton aidant. Que doit répondre et faire un artiste auquel on
reprochera, comme un crime irrémissible, justement celle de
ses qualités dont il se flattait le p l u s , la soudaineté , par
exemple ; et que dira-t-il de l'à-propos flatteur du feuilleton
qui joint à ses stupides sentences le vers de Boileau :
        Vingt fois sur le métier remettez votre ouvrage,
lorsqu'il désirait, pour son compte, présenter son œ u v r e , non
comme un modèle de fini précieux, mais comme le résultat
d'une simple idée rapidement conçue et jetée sur la toile
pendant les courtes lueurs de l'inspiration. Que penser du
critique qui méconnaît ainsi les droits d'une esquisse ! Com-
ment surtout ne pas s'abandonner à la douleur, au découra-
g e m e n t , en voyant la froideur ou de moqueuses risées r é -
sulter du jugement porté par le feuilletoniste ! Il est des
artistes qui ne se relèvent pas après de semblables coups.
Quelques-uns, il est vrai, se jouent, indifférents des opinions
contradictoires qu'ont fait naître leurs œuvres ; d'autres en-
core luttent et se débattent contre la clameur diverse, l'élouf-
fent parfois , et après avoir abattu leur adversaire, s'élèvent
d'autant auprès des sommités éternelles. Ceux-là sont les
heureux. Il en est encore quelques-uns forts puissants, sûrs
d'eux-mêmes et dévoués de leur vivant à l'immortalité ; ceux-
ci sont c o n n u s , et j'appellerai volontiers honte et malédic-
tion sur les écrivains auxquels on doit l'extinction de ces