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476               M. VICTOR DE LAPRADE.
  0 poète ! malheur aux hymnes qui naîtront
  Sans que le nom d'un Dieu soit gravé sur leur front !
  Je sais trois sœurs au Ciel qui, les mains enlacées,
  Font jaillir sous leurs pas 1 or des bonnes pensées ;
  La Grèce en adora les corps chastes et nus,
  Beaux vases qui cachaient des parfums inconnus.
  C'est vous, entre vos bras je m'abandonne, ô Grâces !
  C'est vous qui vers le but portez les âmes lasses ;
  Vous par qui les présens de Dieu nous sont comptés,
  Vous qu'on appelle mieux du nom de Charités.
  Par vous de 1 homme au Ciel et du Ciel à la Terre
  Se fait du double amour l'échange salutaire ;
  Le cœur vous doit son aile et l'esprit son flambeau ;
  Sans vous, tout homme reste incapable du beau
  Grâces en qui j'ai foi, saintes filles de Dieu,
  Touchez, touchez mon front de vos Îèvre3 de feu !
   El quelques pages plus loin, je rencontre des vers, expres-
sion de la pensée génératrice de l'œuvre , qui ne pouvaient
éclore que sous l'inspiration d'une Muse chrétienne et qui
nous transportent subilement du pied du vieil Olympe au
milieu des jardins de TEden, prêts de redevenir déserts et
silencieux.
   Mais l'antique serpent, chez tout homme caché,
   L'orgueil, l'adroit orgueil, tient le cœur de Psyché ;
   Avec son noir venin y répand goutte à goutte
   La fureur de connaître, et le trouble et le doute ,
   Et des sens révoltés l'implacable désir,
   Et l'ennui curieux, mortel à tout plaisir.
   Nous sommes en pleine Genèse. — Je ne m'étonne pas ce
pendant qu'à l'apparition de Psyché plusieurs critiques aient
cru voir flotter sur le poème quelque ombre de panthéisme :
ces chœurs inconnus, ces plantes, ces bois, ces eaux, qui
prennent un corps, une âme, une voix, tout cela pouvait
tromper les esprits inallenlifs : artistes ou poètes, nous ne
nous étions assis au bord des lacs mélancoliques, sur les
grèves désolées du rivage, sous l'ombrage aimé des grands
bois que pour y chanler ou abriter nos amours ou nos douleurs ;
celle alliance inlime avec les choses, ce calme hymen avec la
nature ne nous étaient pas connus, et notre personnalité