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156                       BIBLIOGRAPHIE.
d'autres noms encore, et particulièrement celui d'un poète à
peu près inédit, M. Aubry, qui a signé du pseudonyme de Jean-
le-Scribe des vers qui font regretter leur petit nombre par leur
riche et puissante facture. Oui, notre ville renferme des écrivains
et des poètes remarquables, mais ce qu'elle n'a pas, ce qui lui
manque complètement, selon nous, c'est un public littéraire.
   Lyon possède une académie et des assemblées et sociétés litté-
raires. Les hommes distingués qui vivent dans le cercle de, ces
réunions sont conduits, par leurs relations habituelles, à tomber
dans une illusion singulière. Se trouvant constamment en contact
avec des esprits cultivés, ils arrivent à croire que cette aptitude
aux travaux intellectuels, dont ils ont chaque jour le témoignage
sous les yeux, est générale dans leur ville et se trouve chez la
majorité de leurs compatriotes. Bizarre erreur, qui se dissipe
bien vite pour ceux qui cherchent à vérifier par eux mêmes la
réalité de cette aspiration vers les choses de l'intelligence. Non,
Lyon, en ce moment, n'est pas littéraire. Lyon a des hommes de
talent, mais ils sont entre eux leur propre public. Sortez de vos
sociétés artistiques ou savantes, et allez constater parmi la classe
ouvrière et dans la bourgeoisie, cet état actuel des tendances de
l'esprit; vous n'y trouverez ni le goût des arts, ni l'amour de la
poésie. Est-ce à dire que nous venions, à notre tour, répéter
cette opinion ridicule de certains touristes qui ont décrété, après
vingt-quatre heures de séjour dans nos murs, que Lyon était la
Béotie de la France ? Loin de nous cette pensée ! Lyon est une
ville généreuse où existe le germe des talents de tout genre et
qui s'enorgueillit à bon droit d'une foule d'enfants célèbres. Mais
ce que nous constatons tristement et avec une conviction pro-
fonde, c'est que la masse de la population laisse dormir en elle
 ces instincts élevés dont elle possède le précieux trésor. On lit,
 chez nous, le journal et les romans-feuilletons, on ne lit pas
les œuvres sérieuses et l'on considère la poésie comme un jeu
inutile. Il y a, dans notre ville, des lecteurs isolés et assidus,
mais il n'y a pas de public , c'est-à-dire , pas de masse littéraire
 sur laquelle coure ce fluide intelligent, ce souffle poétique qui
 saisit les foules, les passionne et met tous les lecteurs en commu-