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474                M. VICTOH DE LAPRADE.

fection qu'on remarque dans ses poésies, du fini qui régne
dans les moindres parties de son style. Un tel exemple , du
reste, m'a paru bon à citer pour les jeunes auteurs qui abor-
dent la carrière littéraire, sans réflexion , sans cet amour de
la lutte et cette vocation divine qui font le poète , sans un
idéal au-dessus de leur tête qui soit la règle et le but de leurs
travaux, —talents inféconds, nés pour avorter misérablement
en voulant produire trop vite et trop tôt, pareils à ces fruits
d'une maturité hâtive , qui se détachent de l'arbre avant le
temps , et disparaissent au vent du soir, sans qu'un Å“il s'a-
baisse pour les regarder, ni une main pour les cueillir.
   Il y a donc ainsi, dans notre ville, un éminent poète,
plein de respect pour l'art qu'il cultive en penseur et en ar-
tiste ; ne dirigeant aucune coterie el n'obéissant h aucune ;
restant lui-même ; s'obslinant dans l'indépendance de son
génie; élevant à la poésie un brillant et austère monument
loin, bien loin de toute contention d'école ; vivant pieusement
entre le tombeau de sa mère et le berceau de ses enfants, là,
près du foyer de son père, — gloire de sa vieillesse vénérée
et couronne de ses cheveux blancs —• résistant avec fermeté
aux entraînements vulgaires ; ouvrant dans son cœur un asile
à la dignité littéraire , si souvent, si longtemps évanouie
ailleurs; maintenant enfin sa pensée dans ce monde idéal
qui est, après tout, le monde réel, dans ces sphères sereines
de l'infini où elle a pris son essor, et où elle demeure calme
el inspirée, — comme cet oiseau merveilleux qui dort dans les
airs, en se reposant sur ses ailes.
   C'est ce poète que nous allons essayer de juger.
   La première des publications de M. de Laprade , que je
renconlre dans l'ordre des dates, c'est Psyché.
   Comme exposition , comme plan , comme poésie surtout,
P.sychè est un chef-d'œuvre , el je ne crois pas que, sous ce
dernier rapport, M. de Laprade se soit jamais élevé plus