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M. JDLES JAN1N. ,'Ufi Cette mine réjouie cache cependant une profonde sensi- bilité ; que de pages consacrées au deuil sont écrites avec des larmes dans cette œuvre de vingt-cinq années! Nous nous rappelons encore le premier feuilleton que M. Janin publia après la mort de son patron chéri, M, Ar- mand Bertin , le rédacteur en chef des Débats, l'honneur et la gloire du journalisme en France. Nous qui connaissions les rapports affectueux qui unissaient le maître aux rédae teurs (j'allais dire les disciples), qui étaient selon l'âge, pour lui, ou des frères ou des enfants, nous avons plaint de tout notre cœur, tout en les admirant, MM. de Sacy et Saint-Marc Girardin, qui écrivaient des articles de politique au pied de ce cercueil. Nous ayons déploré ces dures destinées du jour- naliste , qui ne peut guère plus que le comédien, hélas ! rester face-a-face avec sa douleur; que vous ayez perdu votre père, votre mère , votre femme, votre enfant , n'importe il faut sécher vos larmes : on attend votre copie. Heureux , trop heureux si vous n'avez pas ce jour-là à parler d'un livre fait dans la joie de l'âme et le sourire sur les lèvres. Pendant cette semaine , cependant, le Vaudeville (on était au carnaval) avait, joyeux, fait sonner ses grelots. Quand le maître était à l'agonie , le critique avait dû assister à de folles parodies , et écouter, ô douleur ! de plus ou moins bons lazzis pendant que son cœur entendait le râle suprême de l'ami, et il lui fallait écrire l'analyse d'une pasquinade avec sa main chaude encore de la dernière étreinte. Pour cette rude tâche, M. Janin prit tout son courage : il se mit a aller et à venir dans ces bagatelles, a se rappeler les bons endroits , à louer et a blâmer. 11 avait cru pouvoir ainsi, en se faisant violence, aller jusqu'à la fin, il n'en eut pas la force , il ne pouvait lutter contre sa douleur; elle finit par éclater; écartant pièces et auteurs , acteurs et actrices :