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                               M. JULES JANIN.                 301

   Dans tous les cas voici bien sa devise,
   .... Carpe diem quant minimum credula postero (1).
   S'il salue, quand ils passeront devant lui, le beau et la
vertu (et plût a Dieu qu'il y pense), il doit dire comme Piron:
nous nous saluons mais nous ne nous parlons pas. Le bon,
pour cet esprit Ta, c'est de rire à gorge déployée, et tant pis
si la morale n'est pas contente ; le beau c'est d'aller dans
les sentiers détournés, quels qu'ils soient, peu lui importe
à cet amateur de l'imprévu, du nouveau, et surtout de la
gaîté gauloise, pourvu que ce ne soit pas la grande route,
le chemin de tout le monde. Ce n'est pas lui qui admirera
les beautés sévères. Il se pâmera d'aise devant Polichinelle
avec son ami Nodier et, mon Dieu, peut-être il baillera au
nez de Corneille et de Racine. Allez chercher ailleurs qui
vous défende en notre temps malheureux, ô nos maîtres du
XVIIe siècle ; fort heureux serez-vous si l'on ne compte
pas celui-ci dans la farandole qui danse autour du buste de
l'auteur de Phèdre, en criant: enfoncé Racine. Rois, prêtres,
si l'on vous attaque ne comptez pas sur ce joyeux compère,
ne l'entendez vous pas, ce disciple de Béranger, fredonner
d'irrévérencieuses chansons? son roi c'est le roi d'Yvetot, le
curé de son choix, le curé de Meudon.
   Personne ne dut douter, après ce premier feuilleton, que
M. Janin ne fût engagé aux romantiques corps et âme; leurs
libres allures devaient si bien aller a son esprit, il n'en fut rien
cependant. Il ne se rangea ni sous le drapeau des classiques,
ni sous la bannière de la nouvelle école. Si la fantaisie l'attirait
vers celle-ci, le goût des anciens l'appelait aussi vers ceux-là.
Le critique fit donc de l'éclectisme en littérature, prenant,
admirant dans chaque école ce qu'elle avait de beau, de bien,
 sans jamais donner ses sympathies aux exagérations ni aux
médiocrités. On ne le vit jamais s'inquiéter, devant une belle
  (1) Horace, odes, ]. i cr , v. \ i .