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                    PLATON ET SAINT AUGUSTIN.                  207

est-il sorti de soi pour produire l'univers ? Si Dieu devient fé-
cond, selon Platon, si Dieu veut communiquer l'être et la vie,
s'il veut être père, c'est qu'il est bon. M. Saisset nous rappelle
ici de magnifiques passages du Timée : « Disons la cause qui a
porté le suprême ordonnateur à produire et à composer cet uni-
vers. Il était bon et celui qui est bon n'a aucune espèce d'envie.
Exempt d'envie, il a voulu que toutes choses, autant que possi-
ble, fussent semblables à lui. » La création achevée, Platon nous
dépeint le père du monde tressaillant de joie au spectacle de
son œuvre en mouvement et vivante. A cette grande et touchante
image, saint Augustin reconnaît le Dieu de la Genèse, duquel
il est dit, après chaque création : et il vit que cela était bon.
Interprétant ces paroles au sens le plus élevé, saint Augustin y
retrouve l'explication Platonicienne, la raison dernière du pour-
quoi de la création, à savoir la sagesse et la bonté de Dieu.
    Suivons le Timée, M. Saisset nous fera voir, non moins clai-
rement, que saint Augustin y a encore recueilli d'autres lumières
et d'autres vérités. De ce que Dieu est par essence le bien, il
suit, selon Platon, que le monde est essentiellement bon et que
le mal n'a pas d'existence absolue. « Celui, dit-il, qui est parfait
en bonté n'a pu et ne peut rien faire qui ne soit très-bon.«Platon
il est vrai, parle du mal ; il dit que Dieu a donné le dessous au
 mal dans l'univers, mais il entend par là un mal purement re-
latif et non un mal effectif et absolu. Saint Augustin aussi est
 optimiste, il estime que toutes choses sont bonnes dans l'uni-
 vers considérées, non par rapport à notre point de vue, mais
 par rapport à l'ensemble où elles trouvent leur place, leur con-
 venance et leur harmonie. Voilà pour jamais chassées de l'esprit
 de saint Augustin ces grossières chimères du manichéisme qui
 longtemps avaient obsédé son esprit. Il ne concevra plus-le mal
 dans l'univers que comme une privation du bien et non comme
 une essence absolue : v II n'y a, dit-il, aucune nature mauvaise,
 et le mal n'est qu'une privation du bien. (I) »
   Mais qu'est-ce que le mal et le désordre dans l'ordre ? Rap-

  (lj Cité de Dieu, liv. M, chap 22.