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LA GAZZETTE FRANÇOISE. 127 est des beaux jours de la Renaissance, et, malgré le badigeon mo- derne qui la recouvre, on devine encore l'élégance de ses frises, de ses pilastres cannelés et de ses chapiteaux corinthiens scul- ptés avec délicatesse et avec art. La maison que Marcellin habitait et qui a disparu, était située « en une isle appelée le Pré de la Foire ; petit circuit qu'à parler proprement on doit plustôt qualifier abondant et fertil verger que non pas isle, pré, ne place, si comme on dict : La plaine heureusement fertile Bien qu'elle soit vcufve de fleurs, Vault mieux que le champ inutile Esmaillé de mille couleurs. Le grand raport en peu d'estendue, l'aménité du lieu, la salu- brité de l'air, sa commodité et ses délices méritent bien le nom de paradis terrestre, puisqu'à diverses fois de l'année, sans autre artifice que de pescher avec un hameçon d'argent, cette plantu- reuse islette rend quantité et diversité de bons vins, friants, riants, délicieux et de toutes espèces de fruicts, aux plus voluptueuses bouches agréables et savoureux. On nous fait cas des jardins d'A- donis , d'Alcinoé , de Tantale et des Hespérides ; mais ce sont badineries et paintures de mousches, au regard de nostre fécond, plantureux Pré de la Foire. » II. Nous avons fait connaître, autant que possible Marcellin Allard : il nous reste à parler de la Gaszette française, son œuvre capitale. Comme nous l'avons dit précédemment, Allard n'a songé à faire qu'un pot pourri ; tout dans la Gazzette est sans ordre et sans liaison. « Il a fait, dit-il, ce petit bouquet de diverses fleurs recueillies en divers florissans jardins, lié de la soie crue de son industrie. » « Qui ne sçache, ajoute-t-il, pour s'excuser d'avoir traité un sujet facétieux, que Virgille a chanté les propriétez et qualitez d'un moucheron, Lucian de la mouche, Apulée d'un asne, Ron- sard d'un chat, Baïf d'un chien, Jean Passerat d'une linotte, et