page suivante »
26 SKJOUR DE J . - J . ROUSSEAU tait fait un plaisir de l'offrir pour y recevoir le pauvre ma- lade. Au premier février 1769, l'installation était complète.— Cette maison propre, isolée, pleinement dans les goûts de Rousseau, fut exclusivement consacrée à son habitation. Une servante qui paraisssait n'être établie en ces lieux que pour les garder, fut laissée à son service. II avait fallu vaincre une répugnance très grande, lever des difficultés nombreuses pour décider Rousseau à ce changement de domicile. Son carac- tère inquiet, susceptible, restait le môme au milieu des souf- frances. Il n'éprouva pas immédiatement une amélioration dans son état, la convalescence se fît attendre. Dans la der- nière quinzaine de février 1769, répondant à son ami Dupé- rou, tourmenté de ne pas recevoir de ses nouvelles,, il lui disait : « Je suis sur ma montagne, où mon nouvel établis- sement et mon estomac me rendent pénible d'écrire; mon état n'est pas empiré depuis que je suis ici, mais je souffre toujours beaucoup » Les pensées de mort l'assiégeaient sans cesse, on peut s'en .^convaincre par ces paroles : « Ma situation, la néces- sité, mon goût, tout me porte à borner mes désirs et mes soins à finir dans celte solitude, des jours, dont, grdce au ciel, je ne crois pas le terme éloigné. Accablé des maux de la vie et de l'injustice des hommes, j'approche avec joie d'un séjour où tout cela ne pénètre point ; en attendant, je ne veux plus m'occuper, si je puis, qu'à me rapprocher de moi-même, et à goûter ici, entre la compagne de mes infortunes et mon cœur et Dieu qui le voit, quelques heures de douceur et de paix, en attendant la dernière. Qu'on ne me parle plus de projets, il n'en est plus pour moi d'autre en ce monde que celui d'en sortir » Une crainte venait de temps en temps l'agiter au milieu de ses sentiments religieux et de résignation, celle de voir ses ennemis s'attacher à sa mémoire pour la flétrir, comme de