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                          DE SAINT IRÉNÉE.                  151

neur à la cour impériale. Je me rappelle mieux ce qui se
passait alors que les choses récemment arrivées, les con-
 naissances que nous avons acquises dans l'enfance croissant
avec l'âge, et s'unissanl plus étroitement à l'ame. Il me
semble donc voir encore l'endroit où s'asseyait le bienheu-
reux Polycarpe pour nous parler ; le voir entrer et sortir ;
voir ses manières, son air, sa figure ; il me semble entendre
les discours qu'il faisait au peuple, entendre comment il
racontait qu'il avait vécu avec Jean et avec les autres qui
avaient vu le Seigneur; entendre ce qu'il rapportait avoir
ouï raconter des discours du Christ, de ses vertus , de ses
miracles, à ceux qui avaient vu de leurs yeux le Verbe de vie.
Ces choses merveilleuses, la grâce de Dieu me donna alors
de les écouter attentivement, de les consigner, non pas sur
le papier, mais dans mon cœur, el toujours, Dieu aidant,
j'en conserverai précieusement le souvenir. Je puis rendre
témoignage devant le Seigneur que si ce saint vieillard, cet
homme apostolique, avait entendu ce que tu enseignes, il se
fût bouché les oreilles, el se fût écrié, selon sa coutume :
O bon Dieu, à quels temps rn'avez-vous réservé (1).' »
   "Voilà ce qu'ils étaient pour la doctrine de leur Maître, ces
nobles Apôtres ; ils veillaient avec amour et crainte sur le
dépôt sacré, étendant par leurs prédications le règne de Dieu,
et combattant de toutes leurs forces les systèmes philoso-
phiques, ou les rêves creux qui venaient en troubler la paix
et l'harmonie. Ils unissaient à ce zèle pour la doctrine une
charité dont on a un touchant exemple dans l'apôtre saint
Jean. Déjà sur le déclin de l'âge, il avait confié à un évoque
d'une cité voisine d'Ephèse, un jeune homme qui échappa
à son gardien, s'enrôla dans une bande de voleurs et se mit
avec eux à arrêter, à dépouiller les pèlerins. Quand le vieil-
lard apprit cette lamentable nouvelle, il éclata en plaintes
et en reproches sur le peu de soin donné à son cher dépôt,


  (1) D. Massuet, .S. Irenœi Opp., pag. 339.