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bre et de lumière, pour offrir à l'humanité le spectacle de tou-
tes les grandeurs, de toutes les fautes, de toutes les folies, de
tous les crimes et de tous les tourments qui agitent sa ter-
restre carrière. Les drames de Shakspeare, malgré leurs ta-
ches nombreuses, sont l'image la plus complète de la vie, dans
tous les rangs et dans toutes les nations, qui ait jamais été
tracée de main d'homme ; et voilà pourquoi son ombre im-
mense, qui couvre et domine l'Angleterre, se projette en tous
sens sur le reste du globe et ne s'évanouira qu'avec lui.
   A ces côtés quel autre génie s'élève à la suite de Raleigh,
guerrier et historien qui expia sa renommée dans le fond d'un
obscur cachot? C'est Bacon, dont la science admirable, em-
brassant toutes les connaissances de l'homme, les unit, les
coordonne dans un vaste et lumineux ensemble et prépare
l'impulsion victorieuse que Descartes donnera à la philosophie.
Epoque de crise intellectuelle, qui doit bientôt porter des
fruits amers, le siècle d'Elisabeth et de Jacques 1 er (lui-mô-
me écrivain dogmatique), annonce quelque grande catas-
trophe qui bouleversera le sol de l'Angleterre.
   Cette catastrophe imminente et terrible, Charles 1 er en
sera la victime, Cromwel l'exécuteur, et MiUon le poète!
Chantre sublime d'un monde de ténèbres dont les passions
mugissent dans son Enfer, ardent panégyriste de la révolte
dont Satan offre la grande image, il n'entrevoit que dans un
long avenir, dans les lointaines vapeurs de l'Eden, dans les
lueurs radieuses de l'Empyrée, cette source de consolation et
de bonheur qui ranimera l'humanité souffrante. Son siècle
est celui de la lutte ; il ferme les yeux pour ne plus le voir ! Mais
après qu'un revirement de fortune, passager et frivole comme
ceux qu'elle favorise, aura fait paraître sur le trône le volup-
tueux Charles II, l'imprévoyant Jacques II, et provoqué les
 chants de Butler, les sermons de Tillotson, la philosophie de
Locke ; après que Dryden, seul digne, après MiUon, de manier