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 Un scepticisme arrêté d'avance, accuse la raison de paralogisme^ et
 se condamne elle-même à des paralogismes, à des contradictions
perpétuelles et à des procédés artificiels, j'allais presque dire artifi-
cieux, sans le respect qu'il faut garder pour un esprit éminent égaré
dans une route fatale.
   Quelque étendue que soit déjà cette discussion, il la faut achever
en disant quelques mots de l'opinion de Kant sur l'immortalité de
I'ame. Cette opinion est facile à conclure de toutes celles que nous
avons exposées. Si le sujet pensant n'est qu'un sujet logique, s'il n'a
pas de substantialité, d'identité, d'unité et de simplicité réelle, sa
spiritualité doit être fort incertaine, et encore plus sa permanence
après la mort. Kant ici ne va pas aussi loin qu'il devrait aller : si le
moi n'est pas une substance spirituelle, il ne faut pas dire que son
immortalité est douteuse, il faut dire qu'elle est impossible. Car la
mort étant pour nous la décomposition des parties, et la simplicité
étant ce qui constitue l'esprit, si le moi n'a point de simplicité, ni
par conséquent de spiritualité, comme tout composé il est voué à une
décomposition inévitable. Au contraire, si le moi est un esprit, il
peut être immortel, et la spiritualité est au moins le fondement de la
possibilité de l'immortalité. Aussi Descartes avait-il mis le plus grand
soin à établir la spiritualité du sujet pensant. Kant la renverse sans
se donner d'autre peine que de répéter sa maxime que les phéno-
mènes seuls nous étant connus par l'intuition sensible (qui enveloppe
la conscience), les choses en soi et leur nature, soit spirituelle, soit
matérielle, nous échappent invinciblement. Il écarte ainsi le maté-
rialisme et le spiritualisme, les trouvant également faciles à soutenir
et également impossibles à démontrer. Non seulement la substance
du moi peut être matérielle ou spirituelle en tant qu'elle nous est
inaccessible ; il y a plus, les phénomènes de la matière et ceux du
moi ne sont pas très différents, et parconséquent peuvent admettrela
même substance. « Si l'on fait attention, dit Kant, que ces deux es-
pèces d'objets (les phénomènes internes et les phénomènes externes)
ne diffèrent pas les uns des autres intrinsèquement, mais seulement
en tant que les uns semblent extérieurs aux autres, et que, par con-
séquent, ce qui sert de fondement aux phénomènes de la matière
comme chose en soi, pourrait bien n'être pas si différent, alors la