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451 de l'action principale, toutes les nobles figures chevaleresques qui dominent les traditions du nord. Qu'il suffise de signaler ici ce sujet futur de nos études, cette chaîne brillante dont les nombreux anneaux embrassent tout le cycle germanique. Cette époque d'imagination et de gloire s'éclipsa aussi vite que la suprématie allemande, et avec le dernier empereur souabe s'évanouirent les chants du Minnesinger. Les scènes sanglantes de l'interrègne, les querelles et les excès de la no- blesse abrutie par la guerre civile, firent tomber la lyre im- mortelle, dont elle avait tiré des sons si harmonieux, dans les mains actives mais novices de simples et prosaïques artisans. Ceux-ci, sous le nom expressif de Meistersinger, maîtres chan- teurs, croyant pouvoir maîtriser la rime aussi facilement que l'alêne et le rabot, martelèrent des milliers de vers mesurés au compas et à l'équerre, et soumis aux règles de la tablature, mais trop souvent rebelles au bon goût. Gardons-nous toute- fois de juger trop sévèrement ces hommes vraiment estima- bles qui, dans un siècle de transition et de désordre, cherchaient l'oubli de leurs peines dans un noble délassement que d'autres eussent remplacé par de grossiers plaisirs. Plusieurs d'entre eux parvinrent d'ailleurs à une réputation méritée, et il suffit de citer le bon Bans Sachs pour que ce nom réveille aussitôt, dans tous ceux qui connaissent ses œuvres, l'idée de cette loyale franchise, de cette bonhomie pleine de droiture et de sens qui distingue en Allemagne la classe moyenne, le véri- table corps de la nation. La poésie que, dans la première époque, nous avons vue purement religieuse, qui s'éleva dans la seconde à l'ode et à l'épopée, devient dans celle-ci morale, sentencieuse, satyrique, et prépare ainsi, en flétrissant les vices, en stigmatisant les abus, la grande et imposante révolu- tion dont Luther devait être le héros. Si l'influence de ce puissant génie, qui réforma les lettres comme l'Eglise, et qui imprima à la langue nationale toute