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                         ET SON Å’UVRE                          379

 chères études, et pressentant déjà la banqueroute de la
 Renaissance.
    En ce qui concerne la conduite d'Erasme vis-à-vis du
 pontificat romain, M. de Nolhac indique clairement ses
 relations avec Léon X et Adrien VI et parle longuement de
ses rapports avec Luther (25). Il y fait un plaidoyer éloquent
 en faveur de l'indépendance d'Erasme à l'égard de Luther,
 tout à l'honneur de notre humaniste, en même temps qu'un
 parallèle fort judicieux entre ces deux esprits si différents,
 qui ne voyaient ni les gens ni les choses au même point de
vue. Erasme était un sage, un lettré, un indulgent, malgré
que ses yeux de moraliste chrétien ne l'aveuglassent nulle-
ment sur les fautes de l'Église (plusieurs de ses lettres en
font foi, entre autres, celle qu'il écrivit en 1509 à
Alexandre VI). Luther était un passionné et un ardent.
Moine augustin, il sortait pour la première fois de son
monastère, quand il vint à Rome. Il resta trop peu de temps
dans la ville éternelle pour juger avec calme du bien qui s'y
faisait, en dépit du faste païen et de la corruption du temps.
« Au sortir des ombres de son cloître saxon, jeté brusque-
ment dans la pleine lumière de l'Italie de la Renaissance,
il a eu l'éblouissement douloureux des oiseaux de nuit et
cette grande âme troublée a crié au monde son indi-
gnation et sa souffrance dont les conséquences devaient
être si graves sur l'avenir du christianisme. »
  En réponse aux accusations portées contre Erasme sur les
remontrances qu'il adressa maintes fois à la papauté, M. de
Nolhac remarque sagement : « L'Italie de Dante et de
Pétrarque qui voyait dans la papauté sa force et sa gloire a



  (25) Cf. Revue des Deux-Mondes, 1" juillet 1888, p. 191 et sqq.