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A VENISE l6) C'était une féerie, je ne pouvais m'en détacher et elle est restée gravée en traits ineffaçables dans ma mémoire. Je compris alors les charmes de cette ville étrange, la fascination qu'elle exerçait sur ses enfants, leur ardent patriotisme qui pendant des siècles au Moyen Age, en en faisant la reine delà civilisation et des beaux-arts, lui avait assuré la domination des mers. M. de Talleyrand a dit qu'il fallait se méfier du premier mouvement, parce qu'il était le bon. Cet aphorisme, dont je repousse la conclusion pratique, peut être vrai dans la diplomatie, il l'est encore plus dans l'esthétique. Pour moi, ma première impression devant un chef- d'œuvre, la Vénus de Milo, un Raphaël, ou devant ce spectacle de la nature et de l'art réunis ensemble, comme à Venise, ma première impression, dis-je, a été toujours la bonne. Bien loin de m'en métier, j'y suis constamment revenu, parce que j'ai trouvé qu'elle était bien la meilleure, la vraie. Depuis cette nuit-là , j'ai revu Venise, je l'ai admirée, critiquée, jugée sous ses divers aspects, mais rien n'a pu détruire, ni même modifier cette première impression. C'est pour ce motif que j'ai voulu la transmettre, telle que je l'ai ressentie. Je m'estimerai heureux, si elle a pu aussi vous présenter quelque intérêt. E. CUAZ.