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LES SIRES DE BEAUJEU 221 En plus de ces privilèges accordés à leurs petites villes, nos sires affranchirent encore, dans une certaine limite, leurs taillables et leurs mainmortables qui comprenaient la presque totalité des gens de la campagne, où il n'y avait qu'un très petit nombre d'hommes libres. En effet, en rapportant les usages de la Dombes, reconnus et jurés en 1325 par les seigneurs, Aubret fait remarquer que tous les articles qui regardaient les taillables étaient tombés en désuétude par la bonté des sires de Beaujeu. Il ne restait donc presque point de mainmortables dans la Souveraineté (et probablement aussi dans le Beaujolais proprement dit), parce que les sires les avaient affranchis soit formellement, soit virtuellement, en négligeant de faire reconnaître la servitude de leurs hommes, qui purent ainsi acquérir peu à peu leur liberté. Cet esprit généreux et libéral, qu'ils montrèrent dans leurs rapports avec l'Eglise et avec leurs propres sujets, n'était pas seulement inspiré par le calcul et l'intérêt, mais provenait d'une véritable grandeur de caractère qui se mani- festa en bien d'autres occasions. En dépit des torts causés à son abbaye par Humbert I er , saint Mayeul devina chez lui cette noblesse de race, quand il mit, par manière de ven- geance, quatre de ses obéances sous sa protection. Il savait que la confiance est le meilleur moyen de gagner une âme généreuse, et il ne fut pas trompé dans ses espérances. Cette qualité morale se transmit avec le sang et se retrouva à des degrés divers chez tous les descendants d'Humbert, en leur inspirant tous ces actes de libéralité que je viens d'énumérer. Guichard IV en donna encore un bel exemple dans la solution d'un différend avec Cluny. Comme il prétendait certains droits sur les terres de l'abbaye, l'abbé refusa de les lui payer. Les six arbitres, devant lesquels la cause fut