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460 LA GUERRE DE SYRIE par enchantement. On eût dit qu'ils n'attendaient qu'un signal pour opérer cette nouvelle manœuvre. L'infanterie coupée et prise en flanc mit bas les armes. Jamais les Egyptiens n'avaient remporté pareille victoire. Quatre- vingt douze canons, trois mille morts, dix mille prison- niers étaient le fruit de leur victoire, mais aussi, de l'avis de tous, jamais les ordres de Soliman n'avaient été plus clairs, plus rapides, plus enlevants, jamais ils n'a- vaient été exécutés avec pareille audace et pareille pré- cision. La gloire de Soliman était désormais éclatante et assurée. L'armée le sacrait homme de guerre et mettait son nom à côté des plus grands noms. Ibrahim, qui avait montré une grande bravoure, et les autres généraux qui avaient pareillement payé de leur personne, étaient ac- clamés à leur tour et tous les soldats demandaient à grands cris à marcher sur Constantinople. De l'avis de l'armée, l'empire ottoman était à son dernier jour. C'était aussi la fatale prévision des soldats qui, en Grèce, avaient servi sous les ordres de Reschid et qui avaient traversé le Bosphore avec lui : « Reschid, nouifpleurons, lui disaient-ils en marchant à ses côtés ; tu arrives trop tard. C'est fini de nous. » — « Il n'est jamais trop tard, avait répondu Reschid qui voulait relever les courages. Tant qu'il y a du sang dans les veines, rien n'est désespéré. » En arrivant à Konieh, un vieux Mollah blanchi dans la prière, un vieux prêtre musulman, le chapelet à la main et les larmes dans les yeux, s'approcha en tremblant de son cheval : — « Reschid, dit-il, quand les plantes révélèrent à Lockman leurs propriétés médicinales, aucune ne lui annonça qu'elle avait la vertu de ressusciter les morts. 0