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              ON MARIAGE SOUS LES TROPIQUES.             485

   Quant à Rodolphe, il s'ennuyait fort. Il n'y avait ni
 théâtre, ni promenades, ni réunions d'aucune nature. Les
jeunes gens, fort en petit nombre, n'avaient ni son édu-
cation, ni ses goûts, ni ses habitudes. Aucun point de
contact ne pouvait s'établir et, dans l'espèce d'isolement
qui régnait autour de lui, ses pieds, aussi souvent que sa
volonté, le conduisaient chez Mme Fleming dont l'hu-
meur joyeuse illuminait de quelques étincelles de gaité la
tristesse monotone de son séjour. De son côté le général,
ravi de rencontrer des auditeurs complaisants, consacrait
au comte tous les moments perdus que lui laissait le soin de
ses haciendas. La comtesse trouvait à son tour un certain
charme à ces souvenirs d'une autre civilisation, qui tempé-
raient un peu l'amertume des privations qu'endure forcé-
ment toute Européenne dans ces déserts, et une certaine
intimité ne tarda pas à s'introduire entre les deux familles,
qu'une mutuelle attraction réunissait, à l'exclusion des
autres habitants du pays.
   Un jour qu'un violent orage avait forcé M. de Czernyi
à garder la maison, il vit entrer un ancien magistrat qui
rarement le visitait. La conversation roula d'abord sur les
insipidités ordinaires; puis les cultures, auxquelles le
comte s'intéressait fort, trouvèrent leur place, et on finit
par calculer la fortune de chaque hacendado.
   — Le général passe pour riche , demanda M. de
Czernyi ?
   — Eiche ! s'écria le magistrat d'un ton mêlé d'envie,
il posède la moitié de la province à lui tout seul ! Il
voyage sur ses terres pendant plus de cinquante lieues
de longueur, et les meilleurs terrains, les plus gras pâtu-
rages lui appartiennent, Dieu sait comment !.. car dans
ce pauvre pays il n'y a guère que les puissants qui s'en-
richissent. — Mais enfin ils sont à lui, et quand il viendra
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