Revue du Lyonnais » série 3 - n°10 ( 1870 ) » pp.403

                           BIBLIOGRAPHIE.                         403

 tait la cour du grand roi. Le roi d'abord, arbitre suprême de toute
 faveur et de toute justice, protecteur et père de ses sujets, leur
 maître absolu et impeccable.
    La cour est la véritable société française ; en elle se résument
 toutes les qualités de la nation, toutes les délicatesses de l'esprit,
 de l'élégance, c'est le reflet, en un mot, du radieux monarque,
 dont les rayons illuminent le pauvre monde.
    Enfin l'homme de cour, le gentilhomme, le galant homme,
l'honnête homme, l'homme « qui sait la cour, » comme dit La
Bruyère (qui le juge durement, d'ailleurs), tel est le type idéal du
théâtre de Molière. En quoi diffère cet honnête homme-là de
l'honnête homme d'aujourd'hui ? « Ce type de perfection n'est
plus le gentilhomme de cour, La Bruyère l'a percé à jour, Re-
gnard, Dancourt, l'ont ramené à ses justes proportions dans la
personne de leurs chevaliers et de leurs marquis ; Fabre d'E-
glantine, Diderot, Beaumarchais, sous les grands airs et les
belles manières du grand seigneur, ont montré l'orgueil indomp-
table, le froid et cruel égoïsme, l'incurable amour du privilège.
Ce n'est plus Don Juan, ce n'est plus même Alceste, ce n'est plus
le philanthrope bourru et déclamateur du xvmc siècle. » Celui-là
est ennuyeux, et ce vice, insupportable au théâtre, ne rencontre
d'indulgence qu'en famille.
   Enfin, en passant sur le ventre des grognards sensibles et des
fringants colonels du régiment de Scribe, on arrive à l'ingénieur
de la comédie moderne, type nouveau, estimable ; c'est un hom-
me , mais un homme imparfait, prosaïque et tronqué, mais ce
n'est pas l'idéal actuel. Il est encore à trouver, et M. Flotard se
borne, on l'a vu, à en indiquer les principaux traits. Cette préoc-
cupation, fort actuelle, de ramener toute chose à son principe, de
dégager l'inconnue de tous les pi'oblèmes physiologiques, psy-
chologiques et autres, a conduit l'auteur de la Comédie moderne
à chercher , dans les conditions nouvelles où le mouvement de
l'esprit a placé le théâtre, quels sont les types qui correspondent
aujourd'hui à ceux qui se retrouvent dans les comédies et les
 drames du grand siècle et dans les farces et les mystères d'au-
trefois.