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86                     I.F. BOUQUET FATAL,

   Dans toute sa personne, du reste, celte noble dame était
pleine de grâce, de bon goût et d'amabilité.
   Comme la reine Marie-Antoinette, elle avait vu ses cheveux
blanchir en une nuit dans les courtes péripéties d'une horrible ca-
tastrophe. C'était à Saint-Domingue où s'était retiré Monsieur de
Vallouise, ancien préfet maritime d'un des ports importants de
nos colonies. Il y était devenu un très-riche planteur quand
éclata une de ces formidables révoltes de noirs qui ont désolé
cette île. Il y périt victime de son courage et des haines amas-
sées contre d'autres, car lui était un maître excellent. Son im-
mense fortune fut engloutie dans ce désastre, et c'est à peiue
si sa veuve put en recueillir quelques minces débris avant de se
réfugier en France avec sa fille unique. Elle s'en fut cacher dans
un coin du grand Paris l'amertume de sa subite adversité. Elle
 avait des parents et des alliances dans le meilleur monde, il lui
 eût été facile de s'y créer des relations et d'y produire Solange ;
 mais elles ressentaient toutes deux au plus haut degré les farou-
 ches pudeurs des âmes flères quand elles sont blessées, et elles
 préfèrent l'isolement d'une réclusion volontaire à l'affront des
 pitiés protectrices. On comprend quelle réaction salutaire s'opéra
 dans cet isolement par l'apparition de Remy; outre qu'il était
 un sauveur, il devenait un compagnon de solitude; tout concou-
 rait à en faire l'être désormais indispensable dans ce calme et
 décent intérieur.
  Ceux qui ont connu Solange ne pardonneraient jamais à l'au-
teur d'avoir omis d'esquisser son portrait. C'est en tremblant
qu'il l'essaie et par respect pour !a mémoire de cette vierge,
car il connaît tout ce que cette tâche a de décevant pour l'écri-
vain et de démodé pour le lecteur.
                                           Maurice   SIMONNET.




     A continuer.