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                        LE PÈRE DE LA CHAIZE.                           145
sistance avait seule suggéré. Le moment lui semblait propice
pour exterminer ces fermes soutiens du catholicisme.
    « La magistrature de France, dit le protestant Sismondi, regardait l'Or-
dre des Jésuites comme un ancien ennemi qu'elle voulait écraser : accou-
tumée à chercher des crimes et à les établir sur des preuves légales qui
ne satisfaisaient point la conscience, elle semblait renoncer à toute bonne
foi, lorsqu'elle prenait à tâche de charger un prévenu. Les parlementaires,
d'accord avec les Jansénistes, employaient toute la subtilité de leur esprit
à démêler, dans toute les conspirations découvertes contre les rois, l'in-
fluence des Jésuites... » «Ils les accusaient d'avoir été les instigateurs de
Damiens , lorsque Damiens les avait si terriblement chargés eux-mêmes. »
« Les philosophes faisaient ressortir la fatale influence du fanatisme et de
la superstition ; plus impartiaux que les Parlements, ils poussaient à l'abo-
lition de l'Ordre des Jésuites , assurés qu'après lui les autres ne tar-
deraient pas a tomber (1). »

   « Sans respect pour la décision d'un concile œcuménique qui
avait déclaré cet Ordre pieux, » sans respect pour les Papes et
pour l'Église de France, qui n'avaient cessé de le prendre sous
leur sauvegarde, les parlementaires « le déclarèrent anti-français,
anti-social et même impie. » Ils renouvelèrent contre lui les ac-
cusations de Pascal, ils bâtirent un monstrueux échafïaudage de
mensonges et de calomnies, et « transformant en arrêt une Lettre
Provinciale, » ils le condamnèrent à la confiscation et à l'exil
perpétuel.
   Les Jésuites avaient conspiré, rien n'est plus certain; ils avaient
conspiré avec la reine et ses filles, conspiré avec le dauphin et
la dauphine, conspiré avec les plus vertueux amis du roi, cons-
piré avec tous les honnêtes gens du royaume, pour arracher le
faible monarque au joug dégradant de Mme de Pompadour. Les
conspirateurs avaient choisi le moment qui suivit l'attentat de
Damiens pour ramener Louis XV ébranlé, au sentiment de sa
dignité et de son devoir. Loin de sacrifier à l'idole, ils avaient
tenté de la briser. M me de Pompadour avait été sur le point
d'être expulsée de Versailles. Les apôtres de la morale relâchée
ne méritaient aucun pardon. L'indigne favorite s'était emparée
de l'esprit de Choiseul comme du cœur du roi ; ivre de vengeance,
elle demanda l'exécution de l'arrêt, qui condamnait les Jésuites
au bannissement. « D'ailleurs, Choiseul et Mme de Pompadour

  (() Sismondi. Hist. des Français, t. 29.