Pour une meilleure navigation sur le site, activez javascript.
page suivante »
 H(>                    LK PÈRE DE LA CHAIZE.
voulaient détourner l'attention publique des événements de la
guerre. Ils espéraient acquérir de la popularité en flattant à la
fois les philosophes et les Jansénistes et couvrir les dépenses de
la guerre par la confiscation des biens d'un Ordre fort riche, au
lieu d'être réduits à des réformes qui attristeraient le roi et aliéne-
raient la cour (I). »
    Ainsi fut accomplie « la plus yrande iniquité des temps mo-
 dernes (2). »
    Ces illustres instituteurs de la jeunesse, que Grotius et Bacon
avaient proclamés les restaurateurs des Lettres, qui avaient excité
l'admiration de Richelieu et de Descartes, ces courageux athlètes
de la foi qui avaient réduit à l'impuissance le calvinisme et porté
au jansénisme tant de blessures mortelles , ces prédicateurs
éloquents, ces héroïques missionnaires furent brutalement spoliés
et exilés sur le geste d'une courtisane.
   L'innocence des Jésuites était si manifeste, leur malheur si
peu mérité, que leurs plus grands adversaires, tels que Jean-
Jacques Rousseau, d'Alembert, l'astronome Lalande, Sismondi
et la plupart des grands historiens protestants de l'Allemagne,
parmi lesquels le célèbre Ranke, n'ont eu qu'une voix pour flé-
trir l'arrêt de 1762.
   Frappés et menacés par la hache du féroce Pombal, chassés
d'Espagne, de Naples et de Parme, errants-sur les mers, re-
poussés de tous les rivages catholiques, si violente était la per-
sécution, si profonde la terreur au sein des cours, supprimés par
Clément XIV qui, en cédant à l'intimidation et à la force, rendit
hautement justice à leur mérite et à leur vertu, ces malheu-
reux proscrits ne trouvèrent d'asile que dans les Etats de deux
princes schismatiques.
   Il y a plus, n'est-ce pas sur la demande de Catherine II que
Pie VI rétablit en Russie, en 1783 , la Compagnie de Jésus?
  L'hospitalité si généreuse que donnèrent aux Jésuites persé-
cutés le grand Frédéric et l'impératrice de Russie sera leur

  (1) Hist. des Français, par Sismondi, !.. 29, p. 234.
  (2) Paroles de M. de Monlalembort.