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220 DE L'ÉGLISE, DE L'ÉTAT citoyen français, des opinions politiques, il doit comme mem- bre du clergé être au-dessus de toute politique et indifférent à tout acte politique, à moins qu'il ne blesse l'indépendance de sa mission. De son côté, l'Etat en France doit être une société purement matérielle, une société qui représente le principe de la va- riété. Or, la variété c'est l'individualité, l'individualité c'est la liberté. La liberté, voilà l'unique but que puisse avoir en bonne logique le gouvernement français. La science, qui représente dans la pensée humaine la variété, a aussi la li- berté pour caractère distinclif; la science est une chose essen- tiellement individuelle et indépendante; elle ne s'impose point par autorité, elle sollicite humblement l'entrée dans chaque intelligence avec toute la patience du raisonnement, et chaque raison humaine reste juge absolu de la science qui se présente à elle. Cette science qui n'impose point de loi, n'en reçoit de personne ; elle n'a d'autre règle que les faits. Ainsi les mots autorité et science sont incompatibles ; la science qui s'accepte par autorité change de nature et cesse d'être science dans l'individu qui la reçoit ainsi, car il ne sait pas, il croit. Encore une fois, la liberté, voilà la seule vie d'un gouvernement qui, ne s'appuyanl sur aucune religion, ne peut représenter que la science, et ne commande qu'en son propre nom. La variété, comme nous l'avons dit, se réalise par la ma- tière ; le gouvernement doit avoir en main la force maté- rielle, mais de cette force il ne peut faire qu'un usage lé- gitime, c'est de proléger la liberté des individus; tout autre emploi est de sa part une usurpation. Enfin, de même que l'Eglise doit être matériellement étrangère aux mouvements politiques, de même l'Etat doit ne prendre aucune part à tout ce qui est religion ; tout ce qui se passe dans le domaine spirituel de l'Église doit lui être aussi étranger et aussi in- différent que les révolutions des globes qui roulent sur nos têtes à des distances infinies.