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                      M. ALEXANDRE DUMAS.                           161
 C'était un spectacle curieux que de voir M. Dumas" compter avec
 ses doigts les lignes et les bouts de lignes qu'il s'était engagé à li-
 vrer chaque jour, que do l'entendre parler du rude métier qu'il
avait entrepris pendant plusieurs mois, métier à « faire crever un
 cheval de labour, » comme le lui disait son médecin « ordinaire, »
 travail inouï, pour l'exécution duquel l'infatigable romancier avait
 toujours trois chevaux sellés, [rois domestiques prêts à partir, et
le chemin de fer de Saint-Germain à sa disposition, car à toute
 heure du jour et do la nuit il s'agissait de porter cinq manuscrits à
cinq journaux différents. 11 fallait voir comment l'auteur des Trots
 Mousquetaires traitait do « marchandise » les plus heureux produits
 do sa plume, et comme il parlait avec fierté do la plaque de l'ordre
de Charles llï, accordée par la reine Isabelle, non point à l'écri-
 vain, au dramaturge, ui à l'historiographe, disait-il, mais bien au
 marquis Dumas Davy do la Pailleierie. Et les douze prisonniers
français délivrés par les soins de M. Dumas, déclaration affirmée
d'abord dans les termes les plus explicites, mais rétractée le lende-
main dans une lettre écrite sous une inspiration plus convenable et
plus conforme à la vérité ! Et ce malheureux roman do Fabien,
renvoyé de la Prcsse-Caïphe à Pilate-Conslitutionnel,          et finale-
ment brûlé au feu de la conscience de M. Dumas, pour renaître
quelque temps après sous le nom de M. Dumas fils, et avec le titro
de: Aventures de quatre femmes et d'un perroquet ! Et milleautres
particularités que nous négligeons et qui défraieraient à elles seules
plus d'un curieux et piquant chapitre à la manière de Le Sage.
    Nous le répétons, personne ne s'est jamais montré aussi cruel
envers M. Dumas que M. Dumas l'a été lui-môme dans ce procès,
où les indiscrétions rejaillissaient à droite et à gauche comme autant
d'eclaboussures, et où, de toute manière, il eût été convenable de
s'abstenir et de garder le silence. Comment donc s'étonner que, peu
de jours après à la tribune législative, dans une discussion provo-
quée par ses téméraires assertions, M. Dumas n'ait point trouvé
les égards qu'il n'avait pas eus pour lui-même ? Sans approuver
les procédés de la Chambre envers M. Dumas, nous ne pouvons
cependant nous empêcher de reconnaître que si le talent inspire
l'admiration, l'homme seul commande le respect; pour cela il doit
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