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10 LE RENARD DÉPOTÉ. Tous, désintéressés, ne veulent que le bien. Ils flattent l'un, puis l'autre, ils flattent la canaille; Môme avec les roquets le dogue altier ripaille. Le renard entre tous se faisait remarquer : Il prononçait si bien ce grand mot de patrie, Qu'il devint le héros de la foule éblouie. Il va, vient, fait cent tours, habile à débusquer Ses rivaux moins adroits, il sème les promesses ; Qu'on le nomme, et chacun aura part aux largesses ; Il comblera tout le pays : Le loup, gros électeur, pour prix de son suffrage, Exploiterait bientôt un bois des mieux garnis; Dom coursier obtiendrait un meilleur pâturage, Du foin jusqu'au poitrail ! les plus maigres souris, El ce ne serait point une parole vaine, Pouvaient, devaient compter sur quelque grosse aubaine. Les autres candidats n'avaient pas tant promis. « Rien pour moi, criait-il, mais tout pour les amis; « Oui, tout pour le canton dont le vœu me réclame, « Dont je sais les besoins ! » C'était là son programme. On le crut ; la majorité Par acclamation le nomma député. Pour Léontopolis notre renard s'embarque, Se pousse auprès des grands, en impose au monarque, Et fait si bien qu'il joint les profils aux honneurs. Du pays, pas un mol ! les abus subsistèrent : Les parents du renard seulement s'engraissèrent ; Sur leur tôle il plût des faveurs. Le loup eut sa forêt, car il était à craindre ; Dom coursier se vautra sur l'herbe et dans les fleurs. Pour les empêcher de se plaindre,