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508                          CHARLES VI.

de ses forces. A coup sûr, l'auteur de Guido n'a pas en lui cette
source précieuse et toujours jaillissante des grandes inspirations qui
fait les musiciens de génie, et l'on peut contestera ses œuvres la
facilité exubérante, qui est le caraclère de quelques composi-
teurs du second ordre, mais il y a toutefois en lui, pour l'observa-
teur intelligent et de bonne foi, des qualités naturelles et acquises
qui le classent immédiatement au dessous des célébrités musicales
que la France applaudit depuis vingt ans.
    Les auteurs du poème de Charles VI ont usé largement, trop
largement peut-être, du droit que messieurs les faiseurs de livrets
s'attribuent d'arranger nos annales, pour la plus grande gloire du mu-
sicien, et aussi un peu pour leur commodité particulière. L'histoire
est par eux traitée avec un sans-gêne et une liberté grande que rien
ne justifie, et comme s'il ne suffisait pas des terribles réalités qu'elle
 renferme pour inspirer convenablement le compositeur, ils vous la
 traitent de Turc à Maure, absolument comme si elle leur apparte-
 nait. Que les spectateurs donc, et ceux-là sont nombreux, qui vien-
 nent au théâtre dans le dessein de s'y instruire aux récils men-
 songers des poètes, qui se font les très humbles suivants de la muse
 lyrique, ne craignent pas de relire Anquetil ou M. Michelet, mal-
 gré les hauts enseignements que Charles VI aura pu leur donner,
 la leçon ne saurait manquer de leur être profitable.
    Au moment où l'action commence, et se développe dans toutes ses
 parties, le vieux roi est, depuis plusieurs années, en proie à cette
 triste et lamentable folie, qui ne fut pas un des moindres malheurs
de son règne. Le dauphin , calomnié par sa propre mère, est
 perdu dans l'esprit de son père, affaibli par la souffrance. D'un au-
 tre côlé, tandis que les soldats de l'Angleterre couvrent le sol fran-
 çais et que la reine Isabeau de Bavière, donne une fêle brillante au
 duc de Bedford, dans l'hôtel St-Pol, le peuple souffre et se révolte,
 et tout va au plus mal dans ce beau royaume de France. Patience,
 et quelque malheureux et désespéré que paraisse l'état de nos affai-
 res, voici venir une simple jeune fille, comme qui dirait une autre
 Jeanne d'Arc, qui va prendre en main la cause nationale et popu-
 laire, et va tout sauver. Odette, l'héroïne de cette histoire, à grand
 orchestre, est tout simplement la fille d'un pauvre soldat, [le bon-