Revue du Lyonnais » série 1 - n°22 ( 1845 ) » pp.345

                        ET DE SA RÉPARATION.                               345

   L'absence de religion, c'est tout simplement le crime de la
chute.
   C'est pourquoi il est facile d'observer aujourd'hui que les
hommes qui, par un sentiment habituel de suffisance, ne
veulent point avouer à Dieu leur indigence spirituelle, croyant
toujours qu'ils trouveront en eux les ressources spirituelles
dont ils manquent, deviennent tous, qu'ils le veuillent ou non,
premièrement égoïstes, secondement vicieux. Ils ne con-
servent de leur intelligence que ce qu'il leur en faut pour
diriger leurs intérêts matériels; et de leur santé, que ce qu'il
leur en faut pour jouir delà vie du corps.
   Comme l'égoïsme est la dépravation du cœur, ou la perte
de l'amour; comme le vice est la dépravation de la volonté,
ou la perte de la liberté morale, et que les vices conduisent
à l'idiotisme, de cet idiotisme et de celte corruption combi-
nés se forme en eux un état chronique de sottise, sottise si
plaisante que, ne voyant pour s'élever d'autre moyen que
d'abaisser ce qui la domine, elle se met très sérieusement à
mépriser tous les grands sentiments, tout ce qui est saint, dé-
sintéressé, beau et héroïque dans la nature humaine, lmpius
cum in profundum venerit contemnit (1). Ne vous méprenez


    (i) Méfiez-vous de l'homme qui critique ; les enfants ne critiquent pas, ils
admirent. Qu'est-ce que l'homme qui critique, c'est celui qui voit le mal.
Qu'est ce que l'homme qui admire, c'est celui qui ne voit que le bien. Or,
comme on ne découvre que ce que l'on cherche, jugez de quoi se préoccupe
l'ame du critique, et de quoi se préoccupe l'ame de celui qui admire ?
Ces deux habitudes opposées de l'esprit indiquent seules la nature de leur
 cœur. Soyez sûr que les hommes chez lesquels la critique domine, n'ont
jamais aimé ; ceux chez lesquels l'admiration domine, sont ceux qu'il a
fallu arrêter peut-être dans leur amour. Mais regardez ce qu'ils ont pro-
 duit dans le monde : saluez la brillante armée des héros, des poètes, des
 saints, des martyrs, et le touchant cortège des âmes modestes et pénétrées
 qui marchent à leur suite !