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78 THÉÂTRES. on s'en aperçoit à la manière large et dramatique dont elle rend ses rôles; la Dame de Saint-Tropez, enlr'autres. Douée d'une organe sympathique, elle a dans la voie et dans les larmes quelque chose de saisissant et de vrai qui impressionne vivement. Peut-être même abuse-l-elle un peu de celte noie lacrymale. Du reste, cette artiste, aimée de notre public, partage chaque soir les honneurs du rappel avec son maîlre. C'est déjà un beau triomphe. M. Berlioz, l'habile instrumentiste, le spirituel critique des Débats, nous a fait entendre ici les principales œuvres qui ont fondé sa réputation, et qui lui ont valu un si puissant témoi- gnage de la satisfaction de Paganini. On sait que ce virtuose, aussi connu par son talent que par son avarice, envoya à M. Ber- lioz un billet de 20,000 francs, le soir même où il entendit la Symphonie Fantastique. M. Berlioz a dû à cet acte inusité de générosité une grande partie de sa réputation. Ce n'est pas qu'il n'y ait chez lui une profonde connaissance de l'orches- tration, une grande science, et, en définitive, beaucoup de légitimes raisons à son succès, mais hélas! la foule com- prend-elle toujours d'elle-même le talent. Beethoven n'est-i! pas mort presque méconnu de ses contemporains ? Il y a plus d'un rapport entre Beethoven et Berlioz. Ecoulez la Symphonie pastorale de l'un, puis la Scène aux Champs de l'autre, et dites-moi si Berlioz ne s'est pas fortement ins- piré du génie allemand, s'il n'a pas cherché à continuer cette fraîche idylle, cette délicieuse brise qui court sur les fleurs et s'embaume de leurs parfums. Quel contraste saisissant avec son premier morceau, le Bal, où chaque instrument dit son mot, fredonne sa phrase ! Que de noblesse , de distinction et de grâce tout à la fois ! Gluck nous a fait ensuite entendre sa scène d'Armide, le Jardin des Plaisirs, mélodie toujours jeune et toujours délicieuse de rêverie et de simplicité. La broderie n'étouffe pas l'idée ; le chant est aussi clair que le gazouille-