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86         LETTRES ARCHÉOLOGIQUES SOI* LE FOREZ.

fond du vallon, traînent sur les versants, se déchirent
aux sapins, ne sont-ce point des âmes aux blancs lin-
ceuls, les âmes des vieux druides qui reviennent errer
dans ces parages et revoir les lieux qu'ils aimaient?
   Si on en croit, en effet, la tradition, Tailhard fut autre-
fois le temple du druidisme; il abrita sous ses dômes de
verdure les prêtres de Teutatès, et le culte du rameau
vert fut longtemps pratiqué à l'ombre de ses arbres sécu-
laires.
   Les débris de menhirs, les restes de dolmens, que l'on
rencontre encore en maints endroits de la forêt corro-
borent parfaitement cette tradition.
   Proscrits sans pitié par la politique romaine, les
druides se réfugièrent au sein des bois épais, dans les
landes stériles, sur les montagnes désertes où, régnant
encore en maîtres, ils continuèrent à solenniser dans des
cérémonies symboliques les rites de leur religion. Vivaces
représentants de la nationalité gauloise, toujours impla-
cables contre l'étranger, ils s'efforcèrent de conserver
dans leurs dogmes le souvenir de la liberté perdue et ils
surent gardée sur les masses une influence que Rome
essaya en vain de noyer dans leur sang. Leur souvenir
resta longtemps vivant dans le cœur des populations;
l'âme des vieux chênes parlait toujours au paysan attardé,
et, le soir, l'habitant de la forêt, dans les vagues pro-
fondeurs de Tailhard, voit encore passer, flottantes et
voilées, des formes fantastiques, fades et fadets, génies
malfaisants, restes des superstitieuses croyances d'au-
trefois.
   Ce ne fut guère que vers le milieu du troisième siècle,
sous le règne de l'empereur Philippe et sous le pontificat
du pape Fabien, que l'Evangile fut apporté dans les Gaules
par sept évêques venus de Rome : Trophimus à Arles,