Revue du Lyonnais » série 3 - n°18 ( 1874 ) » pp.128

128        LETTRES ARCHÉOLOGIQUES SUR LE FOREZ.

 sance des biens dus à la munificence du seigneur suze-
 rain ; mais il exigea qu'ils payassent chaque année à la
 Chaise-Dieu une redevance en nature et en argent, et à
 l'abbé la procuratie, ou droit de visite abbatiale.
    Après Artaud, Adhémar ou Aimard d'Argental, son
 fils, ne se montra pas moins prodigue de bienfaits envers
le prieuré. Il lui donna le fief de Mazel et la terre de
 Balnieu, et lui octroya encore, disent les vieilles chroni-
 ques, une coupe précieuse d'un superbe travail, de la
 valeur de plus de cent sols d'argent.
    A la mort d'Adhémar, au commencement du douzième
siècle, s'éteignit la race des barons d'Argental, dont
l'héritage passa aux Pagan, leurs alliés. La noble mai-
 son des Pagan continua à couvrir de sa protection les
moines de Saint-Sauveur, et jusqu'au quatorzième siècle,
époque à laquelle disparut cette famille, le prieuré se
ressentit de sa bienveillante suzeraineté. Hugues Pagan,
grand'maître et fondateur de l'ordre du Temple, qui fit
partie delà croisade prêchéepar saint Bernard, en 1118,
sortait de cette maison.
    Je rappellerai en passant que l'abbaye cistercienne de
Clavas, située non loin de Saint-Sauveur, dans la pa-
roisse de Riotort-en-Velay, eut pour abbesses Reynaude
d'Argental en 1284 et Alix en 1306. Isabelle de Lupé fut
abbesse du même monastère en 1455. — Ce n'est pas que,
malgré la protection des seigneurs d'Argental, Saint-
Sauveur n'eût souvent à souffrir des incursions pillardes
des féodaux. Riche et bien doté, possesseur de vastes et
belles terres, il excita plus d'une fois l'envie des barons
d'alentour, et son église, construite en forteresse, ses
remparts flanqués de tours dont on voit encore les traces,
prouvent suffisamment qu'il avait dû songer à prendre
de sérieux moyens de défense.