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LETTRES ARCHÉOLOGIQUES SUR LE FOREZ. 139 forte et puissante, la Révolution les eut bientôt abattus et réduits en poussière. Elle ne fit d'ailleurs qu'achever ce qu'avait commencé le seizième siècle; car déjà , nous l'avons vu, le concordat et les abbés commendataires avaient enlevé aux abbayes leurs statuts et leurs droits, les huguenots leurs trésors et leur prestige ; la Constituante leur porta le dernier coup. Et maintenant, frappé de la foudre, le grand arbre monastique est-il renversé pour toujours? Le verrons- nous reverdir dans un dernier printemps? Les torrents de son antique sève sont-ils à jamais séchés dans ses branches? C'est le secret de l'avenir, mais aujourd'hui que dans la société règne comme un vent du désert qui va desséchant tous les cœurs, que chacun se fait un rem- part de son égoïsme, on aime à se rappeler qu'il fut des jours où se formèrent des associations libres et frater- nelles, pleines de la grande idée de Dieu et de l'humanité, purs et ardents foyers de civilisation morale et intel- lectuelle. Alors, désabusées du monde et de ses erreurs, déraci- nées de la terre, de grandes âmes allaient haut, empor- tées par le souffle de la foi. Alors on connaissait moins cette vie que l'autre, et dans la nuit obscure où nous marchons et que hantent de tous côtés des fantômes, tous suivaient le coeur plein d'espérance l'étoile conduc- trice venue d'Orient. Et cependant elle brille toujours claire et sereine, la radieuse étoile et ses doux rayons éclairent surtout ces thébaïdes de l'amour chrétien où, au milieu des ruines amoncelées, le but suprême nous apparaît sans ombre et sans mystère. Là , tout parle de sacrifice et de renonce- ment, là , tout proclame que seront seuls couronnés les