Pour une meilleure navigation sur le site, activez javascript.
page suivante »
334            LE PAGE DU BARON DES ADRETS,

avant de retourner dans les abîmes rendre compte de leur
mission.
    Le baron, le premier, reprend ses sens; un reste de
moralité l'inspire, il a horreur de sa conduite, du forfait
dont il s'est souillé, de celui qu'il allait commettre. Il s'é-
pouvante à la vue de ce moine qui se consume dans son
tombeau, de cette flamme qui fait crépiter les chairs, de
cette sépulture violée, de cette majesté de la mort, qu'il
a osé braver. Il s'indigne et, n'osant s'accuser lui-même,
il tourne sa fureur contre, son abominable conseiller.
    — Mécréant, fils de l'enfer, lui dit-il, c'est toi qui
m'as perdu, c'est toi qui m'as fait commettre ce crime
inutile ; tu ne porteras pas loin ton impunité.
    Et tirant de sa ceinture le stylet italien qui accompa-
gne son épée, il se précipite sur son complice, mais
Polidino a vu le danger, arraché à sa stupeur par les
menaces du baron; il fuit avant d'avoir reçu le coup ;
il se dérobe, court à travers les tombes, gagne du côté
de l'entrée, gravit rapidement l'escalier, saisit la porte
 entrebâillée, passe et la referme précipitamment derrière
 lui.
    — Tu l'as voulu, dit-il, avec une résolution féroce,
 tu m'aurais tué ce soir ou livré demain au bras sécu-
 lier comme sorcier. Adieu, réfléchis jusqu'à ce qu'on
 t'ouvre, si on t'ouvre jamais.
    Et un bruit de clés tournant dans la serrure fit gémir
 les voûtes de l'église et annonça qu'un nouveau crime
 venait de s'ajouter aux crimes de celte nuit. L'Italien
 poussa soigneusement les verroux, sortit les clés, et
 s'assurant de la solitude du lieu saint, sûr de n'avoir
 aucun témoin de sa vengeance, s'éloigna rapidement,